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L’Aïd, premier jour qui suit le ramadan. Jour de fête. On vient en visite. On porte une chemise d’un blanc éclatant malgré les semaines d’errance, les vêtements lavés avec soin la veille, une tenue envoyée pour l’occasion par la famille et qui porte encore les plis du colis. Un repas se prépare, qui prendra toute la journée à se préparer. En attendant, on partage des dates, le thé ou le café. On se salue, on bavarde, on joue aux cartes, la sono offre des musiques diverses venant des téléphones et des mp3 des uns et des autres. L’atmosphère est chaleureuse, et qu’importe si le chef-cuistot est russe et si les dates sont apportées par des chrétiens calaisiens. Un couple fait et partage du thé, un bénévole fait son cours de français quotidien. Des Calaisiens et Calasiennes, des militantes et militants venu-e-s en renfort se mêlent aux exilé-e-s, la fête relie et favorise la rencontre.

L’assemblée générale du jour prend alors un air décalé. Elle est pourtant bien suivie. Elle reprécise la situation actuelle avec le jugement d’expulsion.

Préparée ce week-end par un petit groupe, une lettre ouverte aux autorités est lue, traduite en plusieurs langues et approuvée.

 

 » Monsieur, Madame,

Nous sommes les réfugiés qui squattons cet endroit et nous sommes de différentes nationalités. Nous vous demandons de ne pas faire preuve d’une violence sadique contre nous et de ne pas nous expulser de cet espace sans nous offrir des solutions dignes.

Nous avons fui nos pays à cause de l’injustice, des guerres, de la dictature, du nettoyage ethnique, de la pauvreté, des emprisonnements arbitraires, des persécutions religieuses, des régimes théocratiques qui nous empêchent de jouir de la liberté de croyance et d’opinion : par exemple, au Soudan, boire une bière vous expose à 40 coups de fouet. Nous souffrons de la marginalisation dans nos pays parce-que nous combattons l’oppression de nos gouvernements et par conséquent, nous n’avons pas accès aux soins, aux écoles, nous n’avons accès à rien.

Nous vous demandons maintenant une protection en tant qu’être humain et nous ne voulons pas que notre situation soit utilisée à des fins de propagande politique. Nous demandons au gouvernement, aux associations humanitaires, aux médias, à la population, de nous soutenir et d’être à nos côtés.

Si nous demandons l’asile en France, nous allons devoir attendre de nombreux mois avant d’avoir accès à un abri, alors qu’en Angleterre, en Allemagne, en Hollande, nous avons accès à une maison, à l’école, à de la nourriture, en somme à des conditions de vie dignes. La France nous laisse à la rue pour plus de souffrance.

Nous voulons que la France donne de bonnes conditions de vie aux réfugiés, et s’ils ne peuvent pas faire cela, ils doivent ouvrir les frontières et laisser les personnes passer en Angleterre. Beaucoup de réfugiés qui ont essayé de se rendre là-bas en sont morts, écrasés sous les roues d’un train, d’un camion, d’un bus. Un migrant soudanais qui essayait de rejoindre l’Angleterre caché sur le toit d’un train a été coupé en deux par un pylone électrique, beaucoup d’autres sont morts sous les roues d’un camion ou à l’intérieur de ces derniers qui sont parfois des camions frigorifiques.

Les habitants et habitantes du 10 impasse des Salines, Calais. « 

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