Ce sont les projets annoncés, à relativement court terme.
Les grilles du port seront rehaussées, des grilles seront installés le long des premiers kilomètres de l’autoroute conduisant au port.
À quelques centaines de mètres de là, le camp Jules Ferry, transformé en accueil de jour. L’idée est qu’il n’y ait pas d’hébergement, et qu’on laisse s’installer des campements autour du camp.
Les dix millions de voyageurs qui transitent par le port de Calais auront donc cette image de la ville : un port et une autoroute entourés de grilles; au pied des grilles, le bidonville de Calais.
Le passage étant devenu plus difficile, le recours à des passeurs sera redevenu nécessaire, alors qu’une grande partie des exilés s’en étaient affranchis ces derniers mois. Ils se partageront le contrôle du bidonville.
Cette situation aura été crée par le ministère français de l’intérieur.
Peut-être faut-il choisir une autre orientation ?
Des grilles plus hautes. Des grilles plus longues. Ça fait penser aux dérisoires sacs de sable que l’on empile quand la rivière déborde. Entre les sacs, dessus, dessous, plus loin ou ailleurs mais l’eau passe quand même. Elle passe toujours.
Il y aura plus de grilles. Et les migrants passeront toujours. Ici et là. Tout pendant que la rivière sera en crue…
Sauf que si la rivière est en crue, ce n’est pas ici. Il y a plus de trois millions de réfugiés syriens en dehors de leur pays, ils n’ont jamais été cent à Calais. Cent cinquante mille exilés sont arrivés en Italie cette année, il y a en ce moment deux à trois mille exilés à Calais, et ils ne sont pas tous passés par l’Italie.
Ce qui n’empêchent qu’ils passent effectivement. En prenant plus de risque, en payant plus cher, mais ils passent.
L’impossibilité de vivre dignement dans son propre pays. Parce qu’il est en guerre, parce qu’il n’y a pas de travail, parce qu’on y est pourchassé, parce que le niveau de la mer monte et noie les îles, parce que telle raison ou telle autre. En bref parce qu’on ne peut plus y espérer une vie digne. La crue, c’est une image pour ce flot de gens toujours grandissant qui ne peuvent plus espérer vivre chez eux et qui partent plus loin. La crue, c’est l’accroissement permanent de la misère ou de la détresse dans les pays du sud.
Faudrait jamais oublier de souligner qu’on ne quitte pas son pays, sa famille, ses amis, ses habitudes, sa langue, sans y être poussé un couteau dans le dos…
Faudrait jamais oublier qu’il y a toujours quelqu’un qui tient le couteau. Ainsi, quand Bolloré inonde l’Afrique de l’Ouest avec du poulet congelé à un euro le kilo, il ruine les paysans qui n’ont plus qu’à partir ailleurs.