Des articles de presse relatant l’événement qui semblent des copiés-collés de ceux l’annonçant. Des médias de toute façon strictement encadrés. Visite du ministre de l’intérieur et de la ministre du logement à Grande-Synthe, près de Dunkerque, à propos de son camp de réfugié.
Donc comme il était annoncé, l’État va financer le fonctionnement du camp de Grande-Synthe. En contre-partie, il désigne comme gestionnaire une association présidée par l’ancien maire socialiste de Dunkerque, et annonce une présence policière accrue. Il annonce aussi la scolarisation des enfants, mais ne dit rien en terme d’intégration des enfants non francophones dans les établissements, de postes d’enseignants, de ramassage scolaire.
http://www.lepoint.fr/societe/grande-synthe-la-victoire-de-damien-careme-29-05-2016-2042866_23.php
http://www.lavoixdunord.fr/region/grande-synthe-la-mainmise-de-l-etat-sur-le-camp-de-ia0b0n3539859
La perspective annoncée est de fermer ce camp dont l’État n’a pas réussi à empêcher l’ouverture.
Au même instant, la mairie de Paris annonce qu’elle va ouvrir des camps de réfugiés à Paris.
http://www.liberation.fr/direct/element/des-camps-humanitaires-bientot-ouverts-a-paris_38331/
La contradiction n’est qu’apparente. Dans les deux cas il s’agit de nier le caractère durable de la question et des solutions à apporter. Les autorités font depuis vingt ans comme si « ça » allait s’arrêter. Et comme elles n’apportent pas de solutions adaptées, elles dispersent les personnes. L’évacuation des campements parisiens se soldait par la dispersion de leurs habitant-e-s dans des hébergements un peu partout en Île-de-France et au-delà dans toute la France (voir ici, ici, ici, ici et là). Dans la plus grande improvisation, des « centres de répit » (voir ici, ici, ici et là) ont été ouverts dans toute la France pour disperser les exilé-e-s du bidonville et du camp de containers de Calais (voir ici et là), et du bidonville puis du camp de réfugié-e-s de Grande-Synthe. Les deux dispositifs sont en train d’être fusionnés – ce qui ne veut pas dire que ça fonctionnera mieux.
Il ne s’agit en effet pas d’accueillir mais de disperser des personnes qui n’ont pas à être là où elles sont. On les envoie dans des CAO (Centres d’Accueil et d’Orientation ou Cet Ailleurs Obligatoire), d’où elles sont transférées dans des CADA (Centres d’Accueil des Demandeurs d’Asile), parfois assignées à résidence ou placées en CRA (Centres de Rétention Administrative) pour être expulsées du territoire, parfois elles quittent le dispositif, pour revenir à Calais, Paris, Grande-Synthe, ou aller ailleurs.
Tout cela ressemble à une partie de bonneteau, « hop hop hop où est le réfugié ? », le ministre bonimenteur lançant des chiffres invérifiables qui devraient prouver qu’il fait quelque chose, brouillant l’attention du chaland.
Brouiller l’attention. Mais que faisait la ministre du logement dans cette galère ? La venue à Calais de la ministre de la justice avec le ministre de l’intérieur avait plusieurs fois été annoncée, mais Christiane Taubira ne l’avait finalement pas fait, puis elle avait démissionné. Son successeur ne semble pas avoir montré d’appétence pour le concept. Alors la ministre du logement. À défaut d’utiliser la ministre de la justice comme alibi au non-droit, le ministre de l’intérieur utilise la ministre du logement comme alibi au non-accueil.