• Accueil
  • À propos
  • Documents
  • Liens
  • Le point sur
  • Les cahiers
  • Newsletter

Passeuses d'hospitalités

~ des exilé.e.s à Calais

Passeuses d'hospitalités

Archives Mensuelles: mai 2016

Casanova à Grande-Synthe : une comédie prévisible est une comédie triste

31 mardi Mai 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 8 Commentaires

Étiquettes

Calais, camp, Dunkerque, Exilés, Frontière, politiques migratoires

Des articles de presse relatant l’événement qui semblent des copiés-collés de ceux l’annonçant. Des médias de toute façon strictement encadrés. Visite du ministre de l’intérieur et de la ministre du logement à Grande-Synthe, près de Dunkerque, à propos de son camp de réfugié.

Donc comme il était annoncé, l’État va financer le fonctionnement du camp de Grande-Synthe. En contre-partie, il désigne comme gestionnaire une association présidée par l’ancien maire socialiste  de Dunkerque, et annonce une présence policière accrue. Il annonce aussi la scolarisation des enfants, mais ne dit rien en terme d’intégration des enfants non francophones dans les établissements, de postes d’enseignants, de ramassage scolaire.

http://www.liberation.fr/france/2016/05/30/grande-synthe-l-etat-prend-la-main-sur-le-camp-de-migrants_1456238

http://www.lepoint.fr/societe/grande-synthe-la-victoire-de-damien-careme-29-05-2016-2042866_23.php

http://www.lavoixdunord.fr/region/grande-synthe-la-mainmise-de-l-etat-sur-le-camp-de-ia0b0n3539859

La perspective annoncée est de fermer ce camp dont l’État n’a pas réussi à empêcher l’ouverture.

Au même instant, la mairie de Paris annonce qu’elle va ouvrir des camps de réfugiés à Paris.

http://www.liberation.fr/direct/element/des-camps-humanitaires-bientot-ouverts-a-paris_38331/

La contradiction n’est qu’apparente. Dans les deux cas il s’agit de nier le caractère durable de la question et des solutions à apporter. Les autorités font depuis vingt ans comme si « ça » allait s’arrêter. Et comme elles n’apportent pas de solutions adaptées, elles dispersent les personnes. L’évacuation des campements parisiens se soldait par la dispersion de leurs habitant-e-s dans des hébergements un peu partout en Île-de-France et au-delà dans toute la France (voir ici, ici, ici, ici et là). Dans la plus grande improvisation, des « centres de répit » (voir ici, ici, ici et là) ont été ouverts dans toute la France pour disperser les exilé-e-s du bidonville et du camp de containers de Calais (voir ici et là), et du bidonville puis du camp de réfugié-e-s de Grande-Synthe. Les deux dispositifs sont en train d’être fusionnés – ce qui ne veut pas dire que ça fonctionnera mieux.

Il ne s’agit en effet pas d’accueillir mais de disperser des personnes qui n’ont pas à être là où elles sont. On les envoie dans des CAO (Centres d’Accueil et d’Orientation ou Cet Ailleurs Obligatoire), d’où elles sont transférées dans des CADA (Centres d’Accueil des Demandeurs d’Asile), parfois assignées à résidence ou placées en CRA (Centres de Rétention Administrative) pour être expulsées du territoire, parfois elles quittent le dispositif, pour revenir à Calais, Paris, Grande-Synthe, ou aller ailleurs.

Tout cela ressemble à une partie de bonneteau, « hop hop hop où est le réfugié ? », le ministre bonimenteur lançant des chiffres invérifiables qui devraient prouver qu’il fait quelque chose, brouillant l’attention du chaland.

Brouiller l’attention. Mais que faisait la ministre du logement dans cette galère ? La venue à Calais de la ministre de la justice avec le ministre de l’intérieur avait plusieurs fois été annoncée, mais Christiane Taubira ne l’avait finalement pas fait, puis elle avait démissionné. Son successeur ne semble pas avoir montré d’appétence pour le concept. Alors la ministre du logement. À défaut d’utiliser la ministre de la justice comme alibi au non-droit, le ministre de l’intérieur utilise la ministre du logement comme alibi au non-accueil.

 

L'Escamoteur_BoschJérôme Bosch : L’Escamoteur.

Pendant ce temps-là, rafles et expulsions à Vintimille

30 lundi Mai 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 3 Commentaires

Étiquettes

Calais, Exilés, expulsions, Frontière, harcèlement policier, politiques migratoires

Pendant que des ministres français font de la figuration à la frontière britannique, la police italienne fait à la frontière française ce que la police française fait à la frontière britannique. À Vintimille https://goo.gl/maps/425WNd1zuW22, des exilé-e-s attendent la possibilité de passer la frontière avec la France. En théorie, il s’agit d’une frontière ouverte, en vertu du principe de libre-circulation à l’intérieur de l’espace Schengen. Dans la réalité, la France pratique les contrôles au faciès à sa frontière.

Aujourd’hui, la police italienne a détruit le campement des exilé-e-s à Vintimille et procède à des rafles en ville, visant aussi bien les exilé-e-s que les soutiens.

https://mars-infos.org/operation-de-chasse-aux-migrant-e-1221

Pour suivre l’évolution de la situation (en italien) :

https://www.facebook.com/Presidio-Permanente-No-Borders-Ventimiglia-782827925168723/

 

Voici la traduction du communiqué du Presidio Permanente No Borders Ventipiglia :

https://noborders20miglia.noblogs.org/post/2016/05/29/liberta-per-le-persone-in-transito-a-ventimiglia/

« Aujourd’hui [29 mai] à 13 heures ont pris fin les 48 heures accordées pour l’évacuation du camp de fortune érigé sur les rives de la Roya, ordonné par le maire local au nom de la sécurité et de l’hygiène publique. Les 200 personnes en voyage ont décidé de se réunir sur la plage, où une assemblée est en cours pour décider ce qu’il faudrait faire. De fait, le camp n’existe plus, mais 150 hommes des forces de l’ordre se sont entretemps réunis à Imperia, où 5 bus sont de plus prêts pour les déportations. Demain matin, l’opétation de police dont l’objectif annoncé est l’éloignement par la force de centaines de personnes de la ville-frontière devrait être déclenchée.

Nous appelons tou-te-s les personnes solidaires à se mobiliser en solidarité avec les personnes en transit à Vintimille, pour la liberté de circulation, contre les détentions et les déportations. En cas d’action de force de la part de la police, nous invitons là où cela est possible à rendre concrète la solidarité à travers des actions de blocage de la circulation et de dénonciations des responsables et des complices des déportations.

Tandis que des milliers de personnes continuent de mourir en mer Méditerranée pour parvenir à atteindre les côtes de l’Europe, nous pouvons observer l’accueil réservé aux survivant-e-s sur les territoires de frontières, où se multiplient les violences et les expulsions par la police sans que celles-ni ne parviennent toutefois à faire plier la volonté des personnes en voyage. A Idomeni comme à Calais, à Lampedusa comme à Vintimille, la lutte pour la liberté de milliers d’hommes et de femmes continue. Nous sommes avec elles et eux, et nous ne resterons pas à rien faire face au nouvel apartheid européen.

Contre les expulsions et les violences
étendre la solidarité, bloquer les déportations !
quelques solidaires de Vintimille
aux côtes de celles et ceux qui voyagent, contre toutes les frontières ! »

 

militariventi-3fcfcDevant la gare de Vintimille.

 

Casanova à Grande-Synthe – Clandestino

30 lundi Mai 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 11 Commentaires

Étiquettes

Calais, camp, Dunkerque, Exilés, Frontière, politiques migratoires

Dans l’agenda du ministre de l’intérieur, une sobre mention « Après-midi : Déplacement en région ». Aucun communiqué, aucune note aux rédactions en ligne sur le site du ministère.

http://www.interieur.gouv.fr/Le-ministre/Agenda-du-ministre/Semaine-du-30-mai-au-3-juin-2016

Sur le site du ministère du logement, rien. Dans l’agenda de la ministre, la journée est vide. Ni actualité, ni communiqué.

http://www.logement.gouv.fr/spip.php?page=agendas&agenda=2016-06-01&annee=&ministre=64

Pourtant, les journaux en parlent, on sait même ce que les ministres vont annoncer, au point que ce n’est plus la peine qu’ils viennent :

http://www.lavoixdunord.fr/region/grande-synthe-l-etat-financera-le-camp-de-la-liniere-ia17b47594n3525798

http://www.liberation.fr/france/2016/05/29/camp-de-migrants-a-grande-synthe-l-etat-s-ouvre-pour-mieux-fermer_1455919a

Comme dans la célèbre comédie italienne « Casanova clandestino o il segreto di Pulcinella ».

En résumé, n’ayant pas pu empêcher la création d’un camp de réfugié pour améliorer les conditions d’accueil des exilé-e-s à Grande-Synthe, le gouvernement décide de le financer et d’en reprendre le contrôle. La gestion en est confiée à l’AFEJI http://www.afeji.org/index2.php , une association présidée par Michel Delebarre, maire socialiste de Dunkerque pendant 25 ans et sept fois ministre. Les choses se passent donc en famille, et le financement de l’État n’ira pas à des inconnus. On prévoit aussi des policiers et des vigiles. Et, plus intéressant, à conditions que ce soit réellement fait et donc qu’il y ait des classes d’accueil, la scolarisation des enfants dans les établissements scolaires de la commune.

 

Et comme les ministères n’ont pas communiqué le programme de la visite, Passeurs d’hospitalités vous le dévoile en exclusivité :

14h – arrivée des ministres au son de l’hymne « La France identitaire », paroles de Manuel Valls, joué par les chœurs de la garde républicaine à cheval

14h15 – inauguration du monument érigé par une souscription des passeurs en remerciement au ministre de l’intérieur, pour sa contribution active à leur prospérité

14h30 – remise de la Légion d’honneur à un industriel chinois fabriquant de dentelle de Calais à Shanghaï, pour l’invention de la dentelle en caoutchouc synthétique qui permet de rendre la frontière étanche

14h45 – grand jeu du policier et du migrant. Les ministres  ont les yeux bandés pour ne pas voir. À chaque fois qu’un policier frappe ou gaze un migrant, les ministres crient « j’ai rien vu ! » À la fin, les policiers reçoivent une promotion et les migrants un billet d’avion

15h30 – remise à chaque migrant d’un kit lui permettant de devenir invisible. Ça permettra de démonter le camp plus vite, puisqu’on ne verra plus personne

15h45 – inauguration en rade de Dunkerque du paquebot Titanic 2017 au son de « Tout va mieux madame la banquise »

16h00 – départ des ministres

 

polichinelle2

 

 

La rareté – suite

29 dimanche Mai 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 1 Commentaire

Étiquettes

bidonville, Calais, Dunkerque, Exilés, solidarité, violence

Grande-Synthe, au sud-ouest de Dunkerque https://goo.gl/maps/vwn1jV6dJFM2. Le petit campement qui abritait de 20 à 80 exilé-e-s en accueille à l’automne 2015 plusieurs centaines, puis jusqu’à trois mille, dans des conditions désastreuses. La municipalité prévoit tout d’abord d’installer des pré-fabriqués pour héberger les personnes dans de mauvaises conditions, puis renonce, ne pouvant suivre l’augmentation trop rapide du nombre de personnes. Elle installe néanmoins des douches et des sanitaires, mais en nombre insuffisant. Les intervenants associatifs s’aperçoivent assez rapidement qu’un groupe contrôle l’accès aux douches et fait payer les exilé-e-s pour y accéder. Il faudra toute une organisation de la part des associations pour rétablir un accès plus équitable.

Téteghem, au nord-est de Dunkerque https://goo.gl/maps/UDVFmpf3RQ72. Le maire veut limiter le nombre d’exilé-e-s présent-e-s dans le campement qui se trouve sur le territoire de la commune à quatre-vingts personnes. En 2014, le nombre d’habitant-e-s du campement augmente de manière importante. La mairie installe un camp de containers de 80 places, et le campement est rasé. Dans les faits, les personnes ne disparaissent pas. Un campement se reconstitue dans les bosquets, beaucoup plus précaire que le précédent, où les associations avaient amélioré les conditions de vie. Et les « passeurs » font payer les places, plus confortables, dans les containers de la municipalité. À l’automne 2015, le nombre d’habitant-e-s du campement de Téteghem augmente jusqu’à atteindre plusieurs centaines de personnes. Après plusieurs destructions d’abris, le campement est détruit et le camp de containers fermé le 18 novembre.

La rareté de ressources vitales n’entraîne pas seulement des tensions qui peuvent se traduire par des explosions de violence, comme on l’a vu à Calais jeudi dernier. Elle favorise le racket si un groupe peut contrôler l’accès à ces ressources. Et les personnes dont les exilé-e-s dépendent pour passer la frontière sont bien placées pour imposer ce contrôle de l’accès aux ressources et pratiquer ce racket. En rendant plus difficile le franchissement de la frontière et en maintenant les exilé-e-s dans une situation d’insécurité et de précarité matérielle, les autorités accroissent le pouvoir des « passeurs » et multiplient les occasions pour ceux-ci de s’enrichir (voir ici et là).

Pour ce qui est des tensions de jeudi à Calais, dès vendredi les imams et anciens afghans et soudanais se sont réunis pour parvenir à une réconciliation et ont réussi à apaiser les tensions. La partie du bidonville qui a brûlé est en cours de reconstruction, si la police, comme elle le fait souvent, ne bloque pas l’apport de matériaux de construction. Les exilé-e-s savent résoudre leurs problèmes, et les associations peuvent les soutenir, quand les autorités ne viennent pas aggraver la situation.

 

 

Encore un mort sur l’autoroute

29 dimanche Mai 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 22 Commentaires

Étiquettes

Calais, Exilés, Frontière, mort

Un exilé afghan est mort hier samedi au lever du jour sur l’autoroute A 16, renversé par un camion, lors d’une tentative de passage.

http://www.lavoixdunord.fr/region/calais-un-migrant-decede-sur-l-a16-percute-par-un-ia33b48581n3534207

http://www.leparisien.fr/faits-divers/calais-un-migrant-afghan-meurt-percute-par-un-camion-28-05-2016-5836913.php

C’est le sixième décès connu à la frontière britannique depuis le début de l’année. Le 10 février, le corps d’un exilé afghan disparu depuis plusieurs jours a été retrouvé dans le port. Le 2 mars, un exilé soudanais a été retrouvé mort dans sa tente dans le bidonville. Le 31 mars, un exilé afghan est mort sur l’autoroute, renversé par un camion qui ne s’est pas arrêté. Le 1er avril, des bénévoles britanniques ont annoncé la mort d’un exilé qui vivait dans le campement de Grande-Synthe. Il avait réussi à passer la frontière sur les essieux d’un camion, qui a eu un accident au Royaume-uni. Le 9 mai, un exilé pakistanais est mort sur la rocade d’accès au port, renversé par une voiture.

 

La rareté

27 vendredi Mai 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 2 Commentaires

Étiquettes

bidonville, Calais, Exilés, solidarité, violence

Dans une situation d’abondance, il y a toujours des gens qui voudront avoir plus. Mais dans une situation de rareté de ressources de base, les situations se tendent autour de l’accès à ces ressources, et peuvent entraîner des violences. C’est ce qui arrive à Calais, où l’État a mis en place des moyens volontairement sous-dimensionnés, et où les associations doivent compenser cette insuffisance par une action basée avant tout sur les dons et le bénévolat.

Qu’il s’agisse des repas, des douches, de la mise à l’abri des femmes à l’intérieur du centre Jules Ferry ou du camp de container, tout a été conçu pour un nombre de personnes très inférieur au nombre réel de personnes présentes sur le site. Qui plus est, les moyens mis en place par l’État rendent les personnes dépendantes là où une action plus intelligente favoriserait l’autonomie.

Un exemple typique est la gigantesque mais insuffisante soupe populaire servie au centre Jules Ferry. Insuffisante, puisque un repas par jour est servi, et que le nombre de repas correspond à la moitié de la population concernée. Gigantesque, puisqu’il s’agit de gérer une file d’attente de plusieurs heures et de plus de deux mille personnes.

Le nombre d’habitant-e-s du bidonville augmente, reflet de la reprise des traversées par la Méditerranée centrale, entre la Libye et l’Italie. L’État est dans le déni, puisqu’il doit fournir des chiffres concernant le nombre d’habitant-e-s montrant l’efficacité de son action visant à faire partir les gens de Calais. L’impératif de propagande empêche la prise en compte de la réalité.

L’arrivée de ces nouvelles personnes font évoluer la population du camp. Alors que les Afghans étaient le groupe principal, à-peu-près le tiers de la population, ce sont principalement des Africains de l’est, notamment des Soudanais, qui arrivent aujourd’hui, et qui doivent se faire une place pour un accès difficile aux trop rares ressources de base.

Alors, les tensions s’accumulent et conduisent à l’explosion. Bilan de celle d’hier : entre une quarantaine et une soixantaine de blessé-e-s selon les sources, cent vingt personnes dont les cabanes ont brûlé. L’État montre qu’il fait quelque chose, mais il ne suffit pas de s’agiter après coup : c’est toute l’approche de la présence des exilé-e-s dans le Calaisis qui est à revoir.

http://www.lavoixdunord.fr/region/migrants-de-calais-apres-la-violente-rixe-de-jeudi-soir-ia33b48581n3532428

 

 

Quand être une ville frontière devient une malédiction

26 jeudi Mai 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 1 Commentaire

Étiquettes

Calais, Exilés, Frontière, politiques migratoires, ville

Une frontière laisse passer des personnes et des choses, en bloque d’autres, en fonction des décisions de l’État voisin. Ce qui est bloqué par les lois de l’État voisin passe par contrebande, activité indissociable de la frontière. Douaniers et contrebandiers sont les deux visages d’une même situation. Calais doit à la contrebande sa prospérité industrielle d’antan : les métiers à dentelle d’invention britannique étaient interdits à l’exportation, ainsi que les ouvriers qui en maîtrisaient la mécanique, pour garder au Royaume-uni cet avantage technologique; et puis des machines et des ouvriers ont passé clandestinement la Manche, et pendant un siècle et demi Calais en a tiré profit.

Une frontière c’est ça, le contrebandier déjoue la surveillance du douanier, le douanier maintient l’activité du contrebandier dans des limites raisonnables. Et la ville vit avec, en tire parfois profit.

Sauf quand les choses tournent au drame. Le drame d’un État, et pire de deux État voisins, dans un ensemble d’autres États, qui ne maîtrise plus bien les choses dans la crise, et veut montrer qu’au moins il maîtrise sa frontière. Un État, et pire deux États voisins dans un ensemble d’autres États, qui maltraite tant sa population qu’il devient impensable qu’il traite bien les personnes nouvelles venues.

Et les choses deviennent alors hors de proportion. La violence se développe au point de coller à l’image de la ville. Les personnes qui sont bloquées à la frontière sont jetées dans une misère qui colle aussi à l’image de la ville. Le visage de la ville est changé. On mure les maisons vides parce que les personnes bloquées à la frontière pourraient s’y abriter, on rase des bâtiments parce que des personnes bloquées à la frontière y ont trouvé abri (voir ici et là). Des grilles poussent aux alentours et dans la ville, pour empêcher le passage, pour empêcher l’installation, et coupent entre autres le port de la ville, comme au temps de la Seconde Guerre mondiale l’occupant avait créé un no-mans-land entre le port et la ville.

On coupe arbres et buissons comme en temps de guerre pour mieux voir la progression de « l’ennemi ». On inonde des terrains comme en temps de guerre pour empêcher la progression de « l’ennemi ».

La ville frontière est soumise à cet impératif guerrier, ses habitant-e-s sont sommé-e-s d’être « pro » ou « anti ». L’impératif de la frontière traverse sa population et son économie, qui croit alors sur elle comme un chancre.

 

Victor Hugo avancée de brise-lame à JerseyVictor Hugo : avancée de brise-lame à Jersey.

La fabrique du rejet

24 mardi Mai 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ Poster un commentaire

Étiquettes

Calais, Exilés, extrème-droite, politiques migratoires, ségrégation, solidarité

L’enquête publiée par Amnesty International concernant l’accueil des réfugiés amène à s’interroger sur la situation à Calais, et le rejet réel ou supposé des exilé-e-s par « la population » ou une partie d’entre elle.

Jusqu’à l’automne 2013, on peut observer des signes de rejet, comme un vote Front national oscillant entre 15% et 30%, ou des pétitions de riverains, mais cela reste discret dans l’espace public. La politique de la municipalité est de plus en plus hostile. Mais ce qui s’exprime le plus dans l’espace public calaisien, c’est la solidarité avec les exilé-e-s, d’où la première priorité que s’est donnée la municipalité de réduire les espaces dans lesquels celle-ci peut s’exprimer.

Un premier pas pour que le rejet occupe l’espace public est franchi à l’automne 2013 à la fois dans l’affichage xénophobe de la municipalité, et avec l’apparition de la page facebook Sauvons Calais et les premières manifestations publiques de ce groupe se revendiquant anti-migrants et hostile aux personnes qui les soutiennent. On a eu à la fois une libération de la parole raciste, dans ses formulations les plus violentes, et une légitimation de l’hostilité manifestée par l’autorité municipale. Fait symbole de cette conjonction la poignée de main de deux adjoints à la maire aux manifestants de Sauvons Calais sur le perron de l’hôtel de ville.

Mais les liens entre Sauvons Calais et l’extrême-droite radicale et la violence qui suit son apparition rendent assez rapidement ce groupe infréquentable. Le relais est alors pris par un syndicat de policiers, Unité SGP Police Force Ouvrière, dont le responsable s’est déjà fait connaître en publiant sur internet des vidéos présentées comme illustrant la violence des « migrants ». Le syndicat appelle à une manifestation anti-migrants le 13 octobre 2014, qui pose les bases d’un « rejet honorable », à partir duquel un discours institutionnel pourra se généraliser, basé sur les critères prétendument objectifs, le danger pour l’économie et l’emploi, le nombre et l’agressivité. Discours qui est formulé de manière à faciliter les revirements d’attitude, « maintenant, ils sont trop nombreux, ce n’est plus possible », « les migrants ne sont plus comme avant, ils sont plus agressifs ».

Ces propos peuvent être repris dans certains milieux professionnels, pour ce qui est du risque pour l’économie ou l’emploi, comme les commerçants ou tenanciers de bars, la direction d’Eurotunnel ou du port, certains syndicalistes du port. Servir de base au discours sur les « assauts de migrants », jusqu’au procureur de Boulogne/Mer qui parle de « guérilla urbaine » dans les médias. Les arrêtés préfectoraux et municipaux, qu’il s’agisse d’interdire des manifestations ou de détruire des parties du bidonville, font référence à la dangerosité, la violence et l’agressivité des « migrants », développant une rhétorique qui les apparente plus à des documents de propagande qu’à des actes administratifs fondant des décisions sur des critères objectifs.

Face à cela existe un discours d’acteurs économiques qui argumente au contraire qu’il faut trouver une solution digne pour les exilé-e-s pour débarrasser la ville de sa mauvaise image et aller de l’avant économiquement, mais il rencontre peu d’écho dans les médias. Et les associations de soutien aux exilé-e-s ont dans l’ensemble délaissé le lien avec la population calaisienne, d’autant plus que l’arrivée des ONG et la main d’œuvre apportée par des volontaires d’un peu partout rendent plus marginale la place des bénévoles locaux.

Pourtant l’importance du travail qui a été effectué pour fabriquer du rejet montre qu’il n’était pas évident de rendre acceptable la violence de la politique menée. Rien ne dit d’ailleurs qu’elle soit acceptée. Simplement, le discours qui la banalise et invite au rejet est parvenu à saturer l’espace public. Évacuant du même coup la réflexion sur les causes de la situation sociale et économique de la ville, et les difficultés réelles que rencontre la population.

 

Extraction_of_the_Stone_Hieronymus_BoschJérôme Bosch : L’extraction de la pierre de folie.

 

Et s’ils se trompaient sur nous ?

23 lundi Mai 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 3 Commentaires

Étiquettes

Asile, Calais, Exilés, Réfugiés, solidarité

Amnesty International vient de publier une étude réalisée dans 27 pays concernant la disponibilité des habitant-e-s à accueillir des réfugié-e-s. Elle est basée sur l’accord ou le désaccord par rapport à deux affirmations :

1- Les gens devraient pouvoir se réfugier dans d’autres pays pour échapper à la guerre et à la persécution.

2- Notre gouvernement devrait faire plus pour aider les réfugié-e-s qui fuient la guerre  ou la persécution.

Combien proche accepteriez-vous les personnes fuyant la guerre ou la persécution ? Cinq réponses au choix : les laisseriez-vous vivre 1- dans votre maison 2- dans votre voisinage 3- dans votre ville ou votre village 4- dans votre pays 5- ou leur refuseriez-vous d’entrer dans votre pays ?

http://www.amnesty.fr/Nos-campagnes/Refugies-et-migrants/Actualites/Sondage-le-monde-veut-se-mobiliser-pour-les-refugies-18385

Les résultats pour la France contrastent avec la politique de non-accueil mise en place par le gouvernement, comme avec son engagement dans les instances européennes pour durcir les politiques anti-migratoires (voir certains des récents développements ici, ici, ici, ici et là, ou bien ici, ici, ici, ici, ici et là)

1- Les gens devraient pouvoir se réfugier dans d’autres pays pour échapper à la guerre et à la persécution : 77% des personnes sont fortement d’accord ou plutôt d’accord.

2- Notre gouvernement devrait faire plus pour aider les réfugié-e-s qui fuient la guerre  ou la persécution : : 63% des personnes sont fortement d’accord ou plutôt d’accord.

Combien proche accepteriez-vous les personnes fuyant la guerre ou la persécution ? Cinq réponses au choix : les laisseriez-vous vivre

1- dans votre maison 9%

2- dans votre voisinage 19%

3- dans votre ville ou votre village 28%

4- dans votre pays 26%

5- ou leur refuseriez-vous d’entrer dans votre pays 17%

Le contraste est encore plus fort au Royaume-uni. Il interroge par ricochet l’attitude du gouvernement français qui se fait complaisamment le gendarme de la frontière britannique et assume toute la violence de ce rôle.

1- Les gens devraient pouvoir se réfugier dans d’autres pays pour échapper à la guerre et à la persécution : : 84% des personnes sont fortement d’accord ou plutôt d’accord.

2- Notre gouvernement devrait faire plus pour aider les réfugié-e-s qui fuient la guerre  ou la persécution : : 70% des personnes sont fortement d’accord ou plutôt d’accord.

Combien proche accepteriez-vous les personnes fuyant la guerre ou la persécution ? Cinq réponses au choix : les laisseriez-vous vivre

1- dans votre maison 29%

2- dans votre voisinage 47%

3- dans votre ville ou votre village 6%

4- dans votre pays 5%

5- ou leur refuseriez-vous d’entrer dans votre pays 11%

6- ne sait pas 2%

Alors quel est le sens de ce qui se passe à Calais ?

 

Vous pouvez télécharger les résultats de l’enquête (en anglais) ici.

 

Brueghel aveuglesBrueghel l’ancien : La Parabole des aveugles.

23 mai à Cherbourg : rassemblement contre les expulsions

23 lundi Mai 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 5 Commentaires

Étiquettes

campement, Cherbourg, Exilés, expulsion, logement, solidarité

L’association Itinérance Cherbourg appelle à un rassemblement :

Lundi 23 mai à 18h

au « Squat Nodez » 36 avenue Henri Poincaré

https://goo.gl/maps/S2Z5sqn8rus

Des exilés étaient accueillis dans des conditions précaires dans une chapelle désaffectée ces derniers mois, mais le bâtiment a été mis en vente et ils ont dû le quitter. Des bénévoles les ont donc aidés à s’installer sous tente sur le terrain où se sont succédé des campements d’exilés depuis 2007, pour interpeller les pouvoirs pouvoirs publics.

http://www.ouest-france.fr/normandie/cherbourg-octeville-50100/les-refugies-afghans-de-retour-dans-leur-squat-1052071

http://www.ouest-france.fr/normandie/cherbourg-des-migrants-de-retour-sur-le-lieu-de-lancien-squat-nordez-4232387

Deux jours après l’installation, la police a fait une rafle dans le campement.

http://www.ouest-france.fr/normandie/cherbourg-en-cotentin-50100/squat-nordez-cherbourg-11-migrants-arretes-par-la-police-4235773

La mairie les a mis en demeure ce samedi de quitter les lieux et menace d’entamer une procédure d’expulsion, sans proposer de solution d’hébergement.

http://www.cherbourg.maville.com/actu/actudet_-cherbourg-les-migrants-sommes-de-quitter-le-squat-nordez_dep-2983677_actu.Htm

 

 

Mairie expulsion Cherbourg

 

← Articles Précédents

Passeurs d’hospitalités

Passeurs : font circuler la parole, et relient les êtres et les rives.

Hospitalités : les mille formes de l'accueil et de la rencontre entre les êtres.

Le bloguistan des Passeurs d’hospitalités

  • Passeurs d’hospitalités – English
  • Exilés dans les Balkans (fr)
  • Exiles in the Balkans (en)
  • Lampedusa – une île

Contact :

passeurs.dhospitalites (at) laposte.net

Entrez votre adresse mail pour suivre ce blog et être notifié par email des nouvelles publications.

Abonnement flux RSS

  • RSS - Articles

Articles récents

  • FEVRIER 2023 A CALAIS
  • JANVIER 2023 A CALAIS
  • DECEMBRE 2022 A CALAIS
  • NOVEMBRE 2022 A CALAIS
  • Une cinquantaine de soutiens entravent de nouveau l’expulsion du campement rue du Beau Marais à Calais
  • Blocage d’une opération d’expulsion quotidienne sur un lieu de vie à Calais
  • La marionette Amal arrivera bien à Calais Dimanche 17 octobre
  • A Calais, trois personnes entament une grève de la faim pour demander l’arrêt de la politique de harcèlement envers les personnes exilées.
  • « Ayez pitié des passants » Lettre d’un exilé de passage, sur la route de l’Angleterre
  • A Calais, suite au décès de Yasser, les personnes exilées appellent à une manifestation pour la paix.

Archives

  • mars 2023
  • février 2023
  • janvier 2023
  • décembre 2022
  • novembre 2021
  • octobre 2021
  • septembre 2021
  • août 2021
  • mai 2021
  • avril 2021
  • mars 2021
  • février 2021
  • janvier 2021
  • décembre 2020
  • novembre 2020
  • octobre 2020
  • septembre 2020
  • août 2020
  • juillet 2020
  • mars 2020
  • mai 2018
  • mars 2018
  • février 2018
  • janvier 2018
  • septembre 2017
  • août 2017
  • juillet 2017
  • juin 2017
  • mai 2017
  • avril 2017
  • mars 2017
  • février 2017
  • janvier 2017
  • décembre 2016
  • novembre 2016
  • octobre 2016
  • septembre 2016
  • août 2016
  • juillet 2016
  • juin 2016
  • mai 2016
  • avril 2016
  • mars 2016
  • février 2016
  • janvier 2016
  • décembre 2015
  • novembre 2015
  • octobre 2015
  • septembre 2015
  • août 2015
  • juillet 2015
  • juin 2015
  • mai 2015
  • avril 2015
  • mars 2015
  • février 2015
  • janvier 2015
  • décembre 2014
  • novembre 2014
  • octobre 2014
  • septembre 2014
  • août 2014
  • juillet 2014
  • juin 2014
  • mai 2014
  • avril 2014
  • mars 2014
  • février 2014

Articles récents

  • FEVRIER 2023 A CALAIS
  • JANVIER 2023 A CALAIS
  • DECEMBRE 2022 A CALAIS
  • NOVEMBRE 2022 A CALAIS
  • Une cinquantaine de soutiens entravent de nouveau l’expulsion du campement rue du Beau Marais à Calais
  • Blocage d’une opération d’expulsion quotidienne sur un lieu de vie à Calais
  • La marionette Amal arrivera bien à Calais Dimanche 17 octobre
  • A Calais, trois personnes entament une grève de la faim pour demander l’arrêt de la politique de harcèlement envers les personnes exilées.
  • « Ayez pitié des passants » Lettre d’un exilé de passage, sur la route de l’Angleterre
  • A Calais, suite au décès de Yasser, les personnes exilées appellent à une manifestation pour la paix.

Archives

  • mars 2023
  • février 2023
  • janvier 2023
  • décembre 2022
  • novembre 2021
  • octobre 2021
  • septembre 2021
  • août 2021
  • mai 2021
  • avril 2021
  • mars 2021
  • février 2021
  • janvier 2021
  • décembre 2020
  • novembre 2020
  • octobre 2020
  • septembre 2020
  • août 2020
  • juillet 2020
  • mars 2020
  • mai 2018
  • mars 2018
  • février 2018
  • janvier 2018
  • septembre 2017
  • août 2017
  • juillet 2017
  • juin 2017
  • mai 2017
  • avril 2017
  • mars 2017
  • février 2017
  • janvier 2017
  • décembre 2016
  • novembre 2016
  • octobre 2016
  • septembre 2016
  • août 2016
  • juillet 2016
  • juin 2016
  • mai 2016
  • avril 2016
  • mars 2016
  • février 2016
  • janvier 2016
  • décembre 2015
  • novembre 2015
  • octobre 2015
  • septembre 2015
  • août 2015
  • juillet 2015
  • juin 2015
  • mai 2015
  • avril 2015
  • mars 2015
  • février 2015
  • janvier 2015
  • décembre 2014
  • novembre 2014
  • octobre 2014
  • septembre 2014
  • août 2014
  • juillet 2014
  • juin 2014
  • mai 2014
  • avril 2014
  • mars 2014
  • février 2014

Méta

  • Inscription
  • Connexion
  • Flux des publications
  • Flux des commentaires
  • WordPress.com

Propulsé par WordPress.com.

Confidentialité & Cookies : Ce site utilise des cookies. En continuant à utiliser ce site, vous acceptez leur utilisation.
Pour en savoir davantage, y compris comment contrôler les cookies, voir : Politique relative aux cookies
  • Suivre Abonné∙e
    • Passeuses d'hospitalités
    • Rejoignez 955 autres abonné∙e∙s
    • Vous disposez déjà dʼun compte WordPress ? Connectez-vous maintenant.
    • Passeuses d'hospitalités
    • Personnaliser
    • Suivre Abonné∙e
    • S’inscrire
    • Connexion
    • Signaler ce contenu
    • Voir le site dans le Lecteur
    • Gérer les abonnements
    • Réduire cette barre
 

Chargement des commentaires…