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Passeuses d'hospitalités

~ des exilé.e.s à Calais

Passeuses d'hospitalités

Archives Mensuelles: novembre 2016

Délit de solidarité, ici et ailleurs

30 mercredi Nov 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

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Belgique, Calais, délit de solidarité, Exilés, frontières, solidarité

La solidarité peut être réprimée sous différents chefs d’inculpations, et les procès se multiplient, pas seulement en France (voir ici, ici et là).

Mercredi 27 juillet, un rassemblement est prévu en hommage d’un exilé mort l’avant-veille. Devant l’augmentation du nombre de décès à la frontière, ça a été une décision inter-associative de tenir ce genre de rassemblement, par refus de la banalisation de ces morts. Celui-ci est interdit par la préfète du Pas-de-Calais au nom de l’état d’urgence. Les personnes venues au rassemblement se dispersent, mais l’une d’elle est arrêtée assez brutalement. Arrivée au commissariat, elle déclare spontanément qu’elle a un canif dans son sac. Traduction policière : rébellion, port d’arme et participation à un attroupement interdit sous l’état d’urgence.

Le procès a eu lieu hier 29 novembre. Le tribunal a relaxé sur les deux premiers chefs d’inculpation qui n’étaient pas constitués en droit, et a condamné à une amende de 400 € avec sursis pour le troisième. Même pas mal d’une certaine manière, mais ni la constitution d’un dossier à charge par la police, ni la violation du droit constitutionnel à manifester au nom d’un état d’urgence sensé servir à lutter contre le terrorisme ne posent problème devant un tribunal.

Demain à Nice, ce sera le procès d’un photographe qui faisait son travail trop près de la frontière italienne, sur le sujet trop sensible de la migration. Rappelons qu’à l’occasion de la destruction du bidonville de Calais, quatre journalistes britanniques ont été arrêtés et expulsés du territoire, et leur traducteur placé en rétention, et un journaliste français arrêté et assigné à résidence dans l’attente de son procès.

Voici ce que dit Ben Art Core de son procès :

« J’ai été arrêté le 05/08/2016 à Menton alors que j’étais dans l’exercice de mes fonctions en tant que photographe.

Les charges retenues contre moi : Délit de Solidarité
– Incitation à la révolte
– Aide directe ou indirecte, faciliter ou tenter de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irrégulier d’un étranger en France
– Outrage

Après mon procès verbal à la PAF (police aux frontières) de Menton (20h de GAV), je suis passé devant le Parquet de Nice (20h de GAV) avec une inculpation complètement modifiée: seule une charge d’outrage est retenue contre moi.

La PAF ayant (indirectement) reconnu leurs erreurs, les charges et les faits ont été modifiés, afin de conforter les agents de la PAF dans leurs bon droits et de justifier l’interpellation.

Je comparaitrai dès 8h30 au Tribunal de Nice (Vieux Nice)
Vous pouvez venir à partir de 11h me soutenir et montrer votre indignation face à cet état autoritaire et par solidarité avec toutes les personnes victimes de répression parce qu’elles sont solidaires des migrants !!! NON aux injustices et à la répression policière et soutien à tout(e)s les réfugié(e)s !

Soutien : LDH Nice, Collectif migrant 06 (Nice), Collectif migrant 13 (Marseille), Action Antifa 06 … »

https://www.change.org/p/solidarit%C3%A9-avec-les-solidaires/u/18612416?tk=hXRdAYPFTqslkcAj6Eq8bCvYoRvt7TKPZAkdTOd-zvQ&utm

À Bruxelles, ce sont des passagers d’un avion qui se sont levés parce qu’ils ont entendu les cris d’une personne qui étouffait à l’arrière de l’avion, que cette personne était un expulsé que la police essayait de faire taire. Et si la police a été obligé de renoncer à l’expulsion, elle a aussi obligé quelques personnes qui étaient dans l’avion à descendre et elles sont poursuivies pour rébellion.

Le procès de deux d’entre elles a lieu à Bruxelles demain 1er décembre.

 

À Calais comme ailleurs, le procès des personnes qui refusent l’inacceptable. À quand le procès de l’inacceptable ?

 

pont_hida_etchy_hokusaiHokusai : Paysans sur un pont dans les provinces frontalières de Hida et Etchu.

Nouveaux remous autour des CAO

29 mardi Nov 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

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bidonville, Calais, centres de répit, Exilés, expulsion, solidarité

Après les grèves de faim dans les Centres d’Accueil et d’Orientation de Rennes et de Beaucé, en Bretagne, c’est Coallia, opérateur pour le compte de l’État de la gestion de certains CAO (voir ici, ici, ici et là), qui est en cause dans le département de la Manche. L’association, qui affiche une image moderniste et se qualifie « d’entreprise associative« , a des activités dans le domaine du logement social, de l’hébergement et de l’insertion sociale.

Le prix de journée prévu par le dispositif CAO, 25 € par personne accueillie, ne permettant qu’un encadrement salarié restreint, il est tentant de pallier au manque de main d’œuvre en utilisant des bénévoles, et de détourner l’élan de solidarité citoyenne au profit de l’État. Encadrer strictement les bénévoles permet en outre de limiter le regard critique et les fuites d’information sur ce qui se passe réellement dans les centres.

Cette situation suscite l’indignation de personnes solidaires des exilé-e-s pour lesquelles une réelle action de soutien est contradictoire avec la subordination à l’État et aux opérateurs de sa politique, comme en témoigne la lettre ouverte ci-dessous :

 

« Lettre ouverte au collectif solidarité migrant 50 et à l’association Coallia

Nous qui n’avons pas adhéré à votre collectif, nous souhaitons vous informer de nos raisons.
Nous avons été très étonné-es de la précipitation avec laquelle ce collectif a été créé, par le manque de concertation et de transparence quant à son organisation. Il n’est pas anodin qu’un collectif de bénévoles soit issu d’une association inféodée à l’État : Coallia.

A la réunion de présentation du collectif, nous avons entendu que les bénévoles souhaitant intervenir devaient fournir leur état civil. Les listes des noms seraient alors transmises à la préfecture pour avoir l’autorisation de rentrer en contact avec les réfugiés. Les personnes fichées S ne seront pas autorisées à venir dans les CAO. Cela concerne de nombreux militants écologistes, opposants à la loi travail, soutiens aux migrants. Celles-ci ont été fichées S dans la foulée de l’État d’urgence avec comme volonté de criminaliser toute forme d’opposition.
Nous avons entendu qu’il ne fallait pas avoir de relations avec les médias, seuls les membres fondateurs communiquent à l’extérieur.
Nous avons entendu les bons conseils :
la moitié finira dans un charter alors ne vous attachez pas trop ;
si vous donnez vos numéros de téléphone, c’est à vos risques et périls.

Nous avons entendu que Coallia gérait l’hébergement, la nourriture et l’administratif, et, que le CSM50 n’avait qu’une visée occupationnelle. Or, nous avons fait remonter qu’à Cerisy-la-Forêt, les réfugiés se plaignaient du manque de nourriture, il nous a été répondu-es : « ils ne savent pas partager ». Gérer l’hébergement ? Coallia n’a pas hésité à prévenir la police quand des travailleurs immigrés se sont retrouvés en situation irrégulière dans le foyer Tuiller, en Île de France. Coallia trahit les engagements moraux du travail social.

Nous avons entendu que le collectif était apolitique et non-militant, et qu’il avait la prétention de contrôler toute intervention auprès des réfugiés.
Nous avons compris que nous étions sommé-es de nous plier aux règles qui avaient été arbitrairement imposées par les 15 membres fondateurs du CSM50.

Le CSM 50 vise à étouffer toutes autres formes d’organisations et à maintenir les réfugié-es dans un état d’isolement et de dépendance infantilisante. C’est une atteinte aux libertés. Sans informations ils ne peuvent pas prendre de vraies décisions pour eux-même, ils ne peuvent pas faire valoir leurs droits et décider de leur avenir.
Lorsque des brochures sur les droits des demandeurs d’asile déboutés ont été distribuées, une bénévole du CSM50 en a aussitôt averti le directeur régional de Coallia. Pas besoin de police, les bénévoles du CSM 50 s’en chargent.
Nous avons appris ultérieurement que le directeur avait imposé de reprendre toutes les brochures distribuées, allant jusqu’à les chercher dans leur chambre, sous les matelas. Dans quel genre d’endroit et de pays contrôle-t-on la lecture et l’information ?

Cela n’est pas notre conception de la solidarité.

Nous n’avons pas attendu et n’allons pas attendre ce collectif pour être actif-active , ici comme ailleurs, avec des réfugié-es.
Beaucoup d’entre nous font parti d’associations et de collectifs, et connaissent les difficultés mais aussi les richesses qu’il y a à s’organiser ensemble.
Les réfugiés n’étaient pas conviés à cette réunion, d’après un des « membres fondateurs  » cela n’était pas l’objet de la réunion… Nous pensons que cette attitude est infantilisante, ramène les réfugié-es au statut d’objet que l’on déplace sans les en informer, que l’on occupe pour qu’ils se tiennent tranquilles.
Nous pensons qu’il n’est pas possible de s’organiser au-dessus d’eux, sans eux, qu’il faut faire « avec » et non pas « pour ». Les réfugié-es sont des humains libres, pensant, sachant et pouvant s’organiser de façon autonome.
Nous n’agissons pas par charité mais bien parce que nous sommes révolté-es par les conditions dans lesquelles ils/elles sont arrivé-es en Europe, par le nombre de personnes qui ont laissé leur vie dans la méditerranée. Nous n’ignorons pas que la France est un des plus grands vendeurs d’armes au monde. De grandes entreprises françaises (Thalés, Bouygue, Vinci …) vendent des armes et « sécurisent » les frontières de l’Europe, de façon mortifère. La politique étrangère et militaire, le passé colonial mais surtout les intérêts économiques (or, uranium, diamant, pétrole,…) de la France sont pleinement responsables des situations que les réfugié-es ont dû quitter.
L’État compte sur la générosité populaire pour palier au manque matériel dans les CAO, alors que dans le même temps lors des évacuations, il n’hésite pas à jeter dans les bennes à ordures les dons des populations solidaires avec les migrant-es. C’est scandaleusement banal.

Nous pensons qu’ici comme à Calais les migrant-es sont les bienvenu-es, que chacun-e a le droit de se rendre là où il le souhaite, là où la nécessité le pousse.
Est-ce dire qu’un collectif est apolitique parce qu’il ne fait pas de vague, obéit aux injonctions de l’État, s’autopolice et entend policer les autres, infantilise les réfugié-es et organise leur isolement ?

Un collectif est-il apolitique lorsqu’il demande aux bénévoles de fournir leur identité, de ne pas s’attacher aux réfugié-es (pour s’assurer de leurs expulsions sans vagues ?), de faire de « l’occupationel » (mot emprunté au monde du travail social généralement utilisé autour du handicap lourd : foyer occupationel) terme autour duquel il y aurait beaucoup à dire tant il véhicule du mépris et de la condescendance pour des personnes qui ne feraient de leur vie rien d’autre que d’occuper le temps qui passe ???

Hum… Hum…et tout ceci ne serait pas politique ?

Nous pensons au contraire que ce type d’organisation est très politique. Qu’elle agit et collabore avec l’État dans un souci de lisser la situation, de diluer le « problème migrant  » sur l’hexagone, d’offrir une image de l’évacuation de Calais réussie aux médias. Tout ceci dans un contexte d’élection présidentielle à venir.

Nous pensons que dans la vie, tout est politique.

Nous luttons pour les droits des migrant-es parce que ce sont aussi nos droits.
Nous luttons pour leur liberté parce qu’il s’agit aussi de notre liberté.

No Borders ! No fronteras ! بلا حدود ! Keine Grenzen ! Senza confini ! Uπάρχουν σύνορα !
Amy Grant & Lee Berty »

 

tsunami_by_hokusai_19th_centuryHokusai : La Grande Vague de Kanagawa.

Vers une dispersion du passage ?

28 lundi Nov 2016

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Calais, Exilés, Frontière, Royaume-uni

Il y a de nombreuses analogies entre la fermeture du Centre de Sangatte en 2002 et la destruction du bidonville de Calais en 2016. Une opération médiatique visant à faire croire qu’on résout un « problème » alors qu’on ne fait que le cacher. Le déploiement policier pour contraindre les personnes à se cacher et donc à être moins visibles (voir ici, ici et là). Le harcèlement des personnes solidaires (voir ici, ici et là). Et jusqu’au dispositif des CAO qui est dans sa conception un calque des Opérations Ulysse qui se sont succédé entre 2002 et 2006.

Dans les faits, la dispersion des campements le long du littoral et des autoroutes qui y conduisent est liée dans un premier temps au développement des dispositifs de contrôle dans le port de Calais et le périmètre du Tunnel sous la Manche, la fermeture du Centre ne fait que l’accentuer. Par contre elle a eu un effet plus direct à Paris, avec l’apparition des campements près de la gare de l’Est. C’est en amont du littoral que les personnes s’orientent, prennent des contacts, attendent une possibilité d’aller vers les lieux de passage.

Les modes de passage ont également évolué. À  cette époque, les aéroports de province étaient moins surveillés, et ont été empruntés avec de faux passeports.

Par rapport au Centre de Sangatte, le bidonville de 2015 – 2016 était aussi un lieu d’attente pour des personnes ayant choisi de demander l’asile en France et qui, du fait de la politique de non-accueil du gouvernement se trouvaient sans hébergement, ou du fait du règlement européen Dublin III attendaient de long mois que la France deviennent responsable de leur demande d’asile. Pour ces personnes, le départ vers les Centres d’Accueil et d’Orientation (CAO – voir ici, ici, ici et là) a été une solution, certes partielle et très imparfaite, du fait de l’accompagnement très inégal et souvent insuffisant et des hypothèques concernant les personnes en procédure Dublin, mais permettant au moins un hébergement.

Pour les personnes qui continueront à vouloir gagner le Royaume-uni, il est probable que la dispersion sensible dès 2014 avec l’augmentation du nombre de personnes à la frontière britannique, le long du littoral de la Bretagne aux Pays-bas et plus loin en amont le long des autoroutes, s’accentuera. Il est probable aussi que le rôle de la région parisienne comme lieu d’orientation et d’attente se renforcera, avec des groupes probablement plus dispersés du fait de l’importante pression policière. Et il est probable aussi que d’autres modes de passage de la frontière que se cacher dans des véhicules, principalement des camions, vont devenir plus important. Le rôle des passeurs s’en trouvera de toute façon accru.

Il est encore trop tôt pour savoir comment le passage se réorganisera, mais la destruction du bidonville est loin d’être la fin de l’histoire.

 

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À Calais, l’État en pleine hésitation

27 dimanche Nov 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

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Asile, Calais, Exilés, hébergement

Alors que les contrôles au faciès continuent dans les gares, les parcs et les rues (voir ici, ici et là), et que la police exhibe les coûteuses technologies qu’elle utilise pour la chasse à l’homme, rien n’est clair quant à la suite de l’action de l’État à Calais.

http://www.nordlittoral.fr/7865/article/2016-11-26/au-coeur-de-la-chasse-aux-squats-en-helico-avec-les-gendarmes

La destruction du bidonville s’est accompagnée de l’évacuation des deux structures d’hébergement mises en place par l’État, le camp de containers et le lieu de mise à l’abri des femmes et des enfants dans le centre Jules Ferry. Les containers sont toujours en place, et personne ne sait s’ils vont être enlevés ou pas, et si une partie des salarié-e-s a été reclassée dans d’autres établissements de la Vie active, l’association gestionnaire de ces deux lieux, d’autres sont toujours employé-e-s sans avoir d’idée précise de ce que sera l’avenir.

Le bureau d’enregistrement des demandes d’asile à la sous-préfecture de Calais est fermé depuis le début de l’expulsion. Des personnes y ont des rendez-vous pris il y a plusieurs mois pour l’enregistrement de leur demande, ou pour le renouvellement de leur attestation de demande, ou ont un rendez-vous dans le cadre d’un placement en procédure Dublin, lorsqu’un autre pays est responsable de leur demande d’asile. Le guichet est fermé, personne ne sait s’il va rouvrir, la préfecture de région à Lille, qui devrait reprendre ces rendez-vous en cas de fermeture du bureau de Calais, renvoie sur le bureau fermé et fait preuve de toute la mauvaise volonté possible.

L’administration est aux abonnés absents, sans perspective, à moins qu’elle ne se résume aux forces de police, comme si la destruction du plus grand bidonville de France avait aussi retranché la ville du territoire français.

 

am-strande-feiningerLyonel Feininger : Sur la plage.

Des CAO au PRAHDA

26 samedi Nov 2016

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Asile, Calais, centres de répit, Dublin, Dunkerque, Exilés, hébergement, Paris

Le PRAHDA (Programme d’Accueil et d’Hébergement des Demandeurs d’Asile) a commencé à faire parler de lui avec l’augmentation des expulsions de demandeur-se-s d’asile en procédure Dublin vers le pays responsable de leur demande d’asile (le règlement Dublin III sert à déterminer le pays européen responsable d’une demande d’asile, le plus souvent le pays d’entrée dans l’Union européenne), en raison d’une de ses missions telles que définies par le marché public qui a été publié : « préparation du transfert des personnes sous procédure Dublin et suivi, le cas échéant, des personnes assignées à résidence dans ce cadre ».

http://www.lemonde.fr/immigration-et-diversite/article/2016/11/08/la-france-se-prepare-a-expulser-plus-de-migrants_5027326_1654200.html

Mais une lecture plus approfondie du marché public montre que le public visé est celui des CAO (Centres d’Accueil et d’Orientation – voir ici, ici, ici et là), c’est-à-dire non seulement des personnes dont la procédure de demande d’asile est en cours, mais aussi :

« Les publics éligibles à une prise en charge en PRAHDA sont :
– les personnes majeures qui n’ont pas encore déposé de demande d’asile, mais qui ont
manifesté l’intention de déposer de manière imminente une demande d’asile ou sont en
attente d’un enregistrement formel de leur demande d’asile auprès du guichet unique pour
demandeurs d’asile ;
– les demandeurs d’asile en cours de procédure en attente d’orientation vers les structures
relevant du dispositif national d’accueil adaptées à leur situation ;
– les personnes sous procédure Dublin, qui pourront y être assignées à résidence, dans l’attente
de leur transfert vers l’Etat responsable de l’examen de leur demande d’asile. »

Tout comme dans les CAO, les personnes n’ayant pas encore déposé une demande d’asile ont un mois pour prendre leur décision :

« Les personnes n’ayant entamé aucune démarche en vue de l’enregistrement d’une demande d’asile dans les 30 jours suivant leur arrivée en PRAHDA, feront l’objet d’une décision de sortie prononcée par l’OFII et devront immédiatement quitter la structure. »

Le sort des demandeur-se-s d’asile en procédure Dublin dans les CAO fait l’objet d’un double discours de la part du ministère de l’intérieur. D’un côté il est dit oralement aux associations qu’elles ne seront pas expulsées. De l’autre les trois circulaires et instructions adressées aux préfet-ète-s leur demandent de mettre à exécution les renvois Dublin (voir ici, ici et là). Dans les faits, la pratique consiste à assigner à résidence les personnes en voie d’expulsion en dehors du CAO, les préfectures ont des pratiques très variables, et la question fait l’objet de jeux complexes entre associations et administration.

Avec le PRAHDA, dont on peut penser qu’il va succéder au dispositif CAO, la question est tranchée au plus direct, assignation à résidence et préparation de l’expulsion dans les centres, de manière à systématiser les expulsions des personnes en procédure Dublin. À partir du moment où le ministère aura décidé de l’attribution de chacun des 12 lots du marché public à un prestataire, celui-ci aura 6 mois pour ouvrir le nombre de places convenu, 3531 au total.

Une clause du marché public prévoit de garantir l’opacité du dispositif et de contrôler l’accès des médias, sous peine de «résiliation du marché aux torts du titulaire » :

« Le titulaire saisit le ministère de l’Intérieur en cas de sollicitation de la part des médias.
Le titulaire s’engage à faire respecter ces obligations à l’ensemble de son personnel et, le cas échéant, à ses sous-traitants et fournisseurs. »

 

Vous pouvez télécharger le marché public PRAHDA ici.

 

275490-chasse-au-filetLa Grande Singerie du château de Chantilly : Chasse au filet.

CAO mineur-e-s : course d’obstacles à la minorité

24 jeudi Nov 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

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bidonville, Calais, Exilés, expulsion, mineurs

L’arrêté du 17 novembre 2016 ne concerne pas que les mineur-e-s expulsé-e-s du bidonville de Calais, mais il est publié maintenant, alors que, lorsque le Home Office aura sélectionné ceux et celles qui seront autorisé-e-s à aller au Royaume-uni, les autres sont sensé-e-s intégrer le système français de droit commun de protection de l’enfance.

Pour mémoire, lors de l’expulsion, des personnes ont été considérées mineures par un tri sommaire hors de tout cadre légal – les personnes considérées comme majeures ne se voyant notifier aucune décision qu’elles pourraient contester, ce qui signifie que des personnes mineures ont été envoyées dans les CAO adultes (Centres d’Accueil et d’Orientation – voir ici, ici, ici et là) sans qu’on sache si et comment elles pourront faire valoir leur minorité, et plus encore accéder à une procédure de réunification familiale avec le Royaume-uni à laquelle elles pourraient éventuellement avoir droit. Puis ces 1900 personnes considérées comme mineures ont été envoyées dans des CAOMI (MI pour Mineurs Isolés – voir ici et là), dans lesquelles a été organisé leur maintien hors droit en attendant la décision du Home Office sur leur accès légal au Royaume-uni.

On peut penser qu’une grande partie des mineur-e-s qui recevront une réponse négative du Home Office, ils et elles quitteront les CAOMI et disparaîtront des radars de la protection de l’enfance. Le système a été organisé pour qu’un maximum de ces mineur-e-s restent hors radar et n’accèdent jamais à une protection.

Mais il est possible qu’une partie des personnes jusque-là considérées comme mineures à l’issue de la procédure de tri hors cadre légal restent dans les CAOMI, et il va alors bien falloir faire quelque chose. À commencer par refaire un tri en utilisant cette fois la procédure légale de détermination de la minorité, avant de les confier enfin aux services de l’Aide Sociale à l’Enfance, soit du département où se trouve le CAOMI, soit d’un autre département. L’arrêté du 17 novembre vient préciser les conditions d’établissement de la minorité.

L’arrêté ne fait nulle part mention des tests osseux pour déterminer la minorité. C’est une méthode intrusive, inexacte et controversée, notamment du point de vue scientifique. Comme la méthode est controversée, elle est masquée par un double jeu de tiroirs. Quand vous lisez « d’investigations complémentaires telles que prévues aux 2° et 3° du II de l’article R. 221-11 du CASF », 2° signifie saisir la préfecture pour vérifier si des documents d’identité ne sont pas faux, 3° saisir le procureur selon l’article 388 alinéa 2 du code civil. Et l’article 388 alinéa 2 c’est les tests osseux. Lesquels sont utilisés systématiquement par une partie des départements où se trouvent des CAOMI pour remettre en cause la minorité des personnes.

Donc, l’arrêté parle de l’évaluation sociale de la minorité, ce qui a toujours l’air plus cool. L’arrêté ne parle pas des critères d’évaluation de l’âge, il dit seulement que le président du conseil départemental s’assure que les personnes réalisant l’évaluation ont une formation ou une expérience leur permettant de le faire.

Par contre, il détaille les étapes de l’entretien :

I L’état civil, à partir des déclarations de la personnes et des documents qu’elle fournit, en signalant les doutes ou incohérence, ce qui va conduire à des « investigations complémentaires telles que prévues aux 2° et 3° du II de l’article R. 221-11 du CASF » (voir plus haut).

II Les liens familiaux, ce qui peut permettre de réunir la personne avec des membres de sa famille, ou établir qu’elle est isolée et prendre par conséquent les mesures de protection nécessaires.

III « La personne évaluée décrit le contexte géopolitique de sa région d’origine » et « L’évaluateur prend en compte l’évolution géopolitique du pays dont elle est ressortissante, telle qu’il peut en avoir une connaissance objective issue notamment de la consultation du site du ministère des affaires étrangères. » Imaginons une personne française de 16 ans ayant éventuellement passé plusieurs mois ou années sur la route, et dont on vérifie qu’elle est bien française en comparant ce qu’elle dit de la France avec des fiches lue sur le site du ministère des affaires étrangères du Japon ou d’Argentine. À priori il y aura de fortes discordances entre la perception qu’un enfant a de son pays et la description géopolitique qui en est faite, ce qui amènera à mettre en doute qu’il vienne bien de ce pays. À part ça, rien à voir avec l’évaluation de la minorité.

IV Le parcours migratoire de la personne et le recours éventuel à des passeurs, ce qui est intéressant pour la police, mais n’a rien à voir avec l’établissement de la minorité.

V Les conditions d’entrée et de séjour en France, même remarque.

VI Conditions de vie depuis l’arrivée en France, idem.

Au final, peu de ces questions concernent l’évaluation de la minorité et les liens familiaux. On peut admettre que le service qui accueillera l’enfant souhaite mieux connaître sa situation et son parcours, mais c’est après la reconnaissance de la minorité, pas forcément dans le même département, et surtout ont peut penser que les travailleur-se-s sociaux-les essayeront d’abord de créer une relation de confiance qui permettra avec le temps de mieux connaître son histoire.

Certains points correspondent à la recherche de contradictions ou d’incohérences dans les déclarations de la personne, d’autres seraient plus en lien avec la demande d’asile, certaines concernent plutôt la police, on peut s’interroger sur les intentions et sur les compétences des personnes qui ont établi cette trame d’entretien.

On peut s’étonner de la présence du ministre de l’intérieur parmi les signataires de l’arrêté. Il s’agit de protection de l’enfance, on ne voit pas trop ce qu’il vient faire là.

La signature du ministre de la justice a une histoire. Comme ces enfants et ces enfants-là spécifiquement sont considérés comme des fardeaux pour les départements qui sont amenés à les prendre en charge, une répartition nationale a été mise en place, et il a fallu trouver une direction ministérielle qui gère le dispositif. Ça a été la Protection Judiciaire de la Jeunesse, rattachée au ministère de la justice, dont l’activité est liée aux mineur-e-s auteur-e-s d’actes de délinquance ou en danger.

Par un communiqué du 2 novembre 2016, le Comité des Nations Unies sur les droits de l’enfant estimait notamment : « Les échecs dans la gestion de la situation des enfants de Calais ne sont pas des événements isolés mais le résultat d’un système de migration lacunaire basé sur des politiques qui se sont développées et ont été mises en œuvre sans prendre en considération les droits de l’enfant ». « Il est essentiel que des mesures soient prises pour que ces enfants bénéficient du soutien nécessaire pour se remettre de ce qu’ils ont vécu. Il convient également de déterminer les responsabilités s’agissant des violations de leurs droits afin que d’autres enfants n’aient pas à subir un sort similaire ».

https://www.un.org/apps/newsFr/storyF.asp?NewsID=38418&Kw1=migrants&Kw2=Calais&Kw3=experts

 

Vous pouvez télécharger l’arrêter du 17 novembre 2016 ici.

 

piranesi9cGiovanni Battista Piranesi : Prisons imaginaires, planche VII.

 

Alerte expulsions vers le Soudan : le soutien continue

23 mercredi Nov 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

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bidonville, Calais, Exilés, expulsions, rétention

Baker a refusé de monter hier soir dans l’avion qui devait le conduire au Soudan via Doha. Il n’a pas été forcé à embarquer, comme c’est souvent le cas lors d’une première tentative d’expulsion, mais les choses devraient être plus musclées pour d’autres tentatives. Ce répit devrait permettre que les derniers recours en justice qui ont été déposés soient audiencés, puisque le gouvernement n’avait pas jugé utile de différer l’expulsion pour attendre la décision des juges (voir les épisodes précédents ici, ici, ici et là).

Dans l’attente, il est important de maintenir la pression sur les acteurs impliqués :

Le ministre de l’intérieur, responsable d’une décision d’une telle gravité : vous pouvez écrire à sec.immigration@interieur.gouv.fr

La préfète du Pas-de-Calais, auteure de la décision et qui peut l’annuler :

par téléphone : 03.21.21.20.00

par fax : 03.21.55.30.30

sur le formulaire de la préfecture : http://www.pas-de-calais.gouv.fr/Contactez-nous

La compagnie Qatar Airways, auprès de laquelle sont réservés les vols pour les expulsion. Vous pouvez téléphoner à son agence de Paris ou vous y rendre pour expliquer courtoisement votre point de vue sur leur participation à ces expulsions.

http://www.qatarairways.com/fr/fr/contact-us.page

Qatar Airways, Agence de Paris, 19 rue de Ponthieu, 75008 Paris, France, 01 43 12 84 40

Vous pouvez aussi l’interpeller sur facebook : https://www.facebook.com/qatarairways

Qatar Airways est une des compagnies pas si nombreuses qui desservent l’aéroport de Khartoum. Elle est aussi une des très rares qui desservent celui d’Asmara, capitale de l’Érythrée. Son rôle dans les expulsions devrait donc s’accroître avec les développement du processus de Khartoum entre l’Union européenne et les État d’Afrique orientale et les accords de réadmission avec le Soudan.

C’est une compagnie qui soigne particulièrement son image, mettant en valeur ses « projets sociaux » :

http://www.qatarairways.com/fr/fr/csr-social.page

sa « conscience enrivonnementale » :

http://www.qatarairways.com/fr/fr/csr.page

ses « récompenses » :

http://www.qatarairways.com/fr/fr/our-awards.page

ou l’expérience inoubliable du transfert par l’aéroport international de Doha :

http://dohahamadairport.com/

Son PDG, Akbar Al-Baker, a été fait officier de la légion d’honneur par François Hollande le 5 juin 2015.

http://www.humanite.fr/francois-hollande-doit-retirer-la-legion-dhonneur-au-pdg-de-qatar-airways-576690

Une image bien incompatible avec l’envoi des personnes expulsées vers les geôles de la dictature soudanaise.

Pour argumenter, vous pouvez vous baser sur les constatations d’Amnesty International :

https://www.amnesty.fr/refugies-et-migrants/actualites/france-deux-personnes-bientot-renvoyes-dans-un-pays

https://www.amnesty.org/fr/countries/africa/sudan/report-sudan/

 

 

Alerte expulsion vers le Soudan : urgent – vol programmé ce soir

22 mardi Nov 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

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bidonville, Calais, Exilés, expulsions, rétention

Le tribunal administratif a rejeté la requête de Baker pour faire annuler le Soudan comme pays d’expulsion (voir ici, ici, ici et là). Un vol est prévu ce soir pour son expulsion. Les deux derniers recours déposés seront audiencés après, et ne suspendent pas l’expulsion : vu le mépris du ministère de l’intérieur pour l’institution judiciaire, il est peu probable qu’il diffère l’expulsion pour attendre la décision des juges.

Le vol est prévu à 21h20 avec changement à Doha, par Qatar Airways.

http://www.parisaeroport.fr/passagers/les-vols/vols-depart/D_C11?ckey=20161122CDQR%20038%20%2020161122DOH

Vous pouvez, de manière urgente :

envoyer des mails au ministre de l’intérieur pour lui demander l’annulation de l’expulsion sec.immigration@interieur.gouv.fr

appeler Qatar Airways pour leur demander de ne pas prendre ce passager en raison du risque d’arrestation et de torture à l’arrivée au Soudan : 01.70.95.05.80

Comme le rappelle Amnesty International : « Les agents de sécurité interrogent systématiquement les personnes renvoyées au Soudan. Ces services ont souvent été responsables de violations graves des droits humains, tels le recours à la détention arbitraire, la torture et des mauvais traitements. »

https://www.amnesty.fr/refugies-et-migrants/actualites/france-deux-personnes-bientot-renvoyes-dans-un-pays

 

Délit de solidarité : d’une frontière à l’autre

22 mardi Nov 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

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Calais, délit de solidarité, Exilés, frontières, Italie, solidarité

Les poursuites contre les personnes solidaires des exilé-e-s se multiplient. Pas seulement à la frontière britannique ou à Paris, mais aussi à la frontière italienne (voir ici et là).

Demain 23 novembre, deux personnes, Cédric Herrou et Pierre-Alain Manonni, passent en procès pour avoir « par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irréguliers, d’un étranger en France » (article 622-1 du CESEDA – Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droits d’Asile), ce qui peut entraîner 5 ans de prison et 30 000 euros d’amende. Il s’agit du « délit de solidarité » célèbre sous l’aire Sarkozy. Si la loi du 31 décembre 2012 a élargit les exceptions pour lesquelles il ne peut pas y avoir de condamnation (article 622-4 du même code), le « délit de solidarité » n’a jamais été aboli.

En plus de ces deux personnes, Claire Marsol a été condamné à 1500 € d’amende le 18 décembre 2015 pour avoir emmené des exilé-e-s à la gare (elle a fait appel), Francesca Peirotti est convoquée devant le tribunal de grande instance de Nice le 4 avril 2017, et Hubert Jourdan coordinateur de l’association Habitat et citoyenneté, a été arrêté et placé en garde-à-vue le 20 novembre 2016.

http://entraides-citoyennes.org/la-roya-vallee-maudite-pour-les-soutiens-des-migrants/

Une pétition « Solidaires avec les citoyens solidaires des réfugiés ! » a été mise en ligne :

https://www.change.org/p/solidarit%C3%A9-avec-les-solidaires

ainsi qu’une pétition de soutien à Pierre-Alain Manonni :

https://www.change.org/p/tous-avec-pierre-alain

Celui-ci a publié un texte expliquant son engagement :

 

https://blogs.mediapart.fr/pierre-alain-mannoni/blog/111116/pourquoi-j-ai-secouru-des-refugies

« J’ai 45 ans et 2 enfants. Je suis fonctionnaire de l’Education Nationale, Ingénieur d’Etude dans un laboratoire de recherche du CNRS / Université Nice Sophia Antipolis et enseignant à la Faculté des Sciences. Je n’étais pas jusqu’à présent militant politique ou associatif.

Dans ma famille on est Corse. J’ai passé toutes mes vacances au village de Pero-Casevecchie dans la maison de mon grand-père, le médecin du canton qui faisait ses visites à cheval. Au village, presque 50 ans après sa mort, les gens en parlent encore car que ce soit en pleine nuit à l’autre bout du canton, que ce soit un bandit blessé ou un paysan qui n’ait pas de quoi payer, il soignait. Dans les récits que me racontait mon père et dans les expériences que j’ai vécu là-bas, j’ai appris et compris qu’on ne laisse pas quelqu’un en danger sur le bord de la route, d’abord parce que c’est la montagne mais aussi parce que c’est une question de dignité. Ou d’honneur comme on dit.

J’ai la chance d’avoir des enfants et en tant que père avec la garde partagée, j’ai pris cette tâche pas évidente très au sérieux. Pas évidente car aujourd’hui le monde va mal que ce soit d’un point de vue social ou environnemental alors au delà d’une “bonne situation”, ce que je souhaite pour mes enfants, c’est qu’ils soient l’espoir d’un monde meilleur.

Le Dimanche 16 octobre en rentrant en voiture de la fête de la brebis à la Brigue avec ma fille de 12 ans, nous avons secourus 4 jeunes du Darfour. La Brigue est un village français dans la vallée de la Roya qui est frontalière de Vintimille en Italie. C’est dans cette vallée que sont régulièrement secourus hommes mais surtout femmes et enfants qui se trouvent sur ces routes de montagnes et qu’on appelle migrants. Ces 4 jeunes étaient complètement perdus et se dirigeaient à pied, certains en bermuda, vers les montagnes enneigées. Avec ma fille on les a ramené à Nice, ils ont mangés et dormi avec nous dans mon appartement de 40m2. Le lendemain comme tous les jours d’école nous nous sommes levés à 6h15. Ils sont venus avec moi déposer ma fille à l’école puis je les ai déposé dans une petite gare peu surveillée par la police et je leur ai payé un billet de train pour la première partie du trajet. Ils devaient retrouver leur famille à Marseille.

C’était ma première action de secours envers ces “migrants”. Pourquoi je l’ai fait ce jour là ? Jusqu’à présent avec mes enfants j’avais déposé des vêtements à la croix rouge à Vintimille, des chaussures, un sac à dos, pour aider mais aussi pour leur montrer qu’il y a des injustices dans le monde et que chacun de nous peut faire quelque chose… Là c’était la deuxième fois que je voyais un groupe sur le bord de la route. La première fois j’avais hésité, je n’avais pas eu le courage, mais cette fois-ci il y avait ma fille et j’ai pu lui montrer l’exemple.

Le lendemain lundi 17 octobre, après une soirée chez des amis dans cette même vallée, sur le retour vers Nice, je décide de m’arrêter dans ce camp pour migrant à St Dalmas de Tende, un bâtiment désaffecté pour colonies de vacances de la SNCF qui a été ouvert en urgence quelques heures auparavant, sans autorisation, par un collectif d’associations dont la Ligue des Droits de l’Homme, Amnesty International et un tas d’associations nationales et locales. L’ouverture de ce lieu à fait l’objet d’un communiqué de ces associations dans les médias. Je sais bien que mon retour vers Nice est une opportunité d’en sortir quelques-un de ce lieu sans eau ni électricité et ou la température en pleine nuit ne doit pas dépasser 10 degrés. Je décide d’en ramener chez moi et de les déposer à la gare le lendemain.

Ce sont 3 filles qu’on vient d’aller chercher à l’étage. Elles sont contentes de ma proposition me dit on car elles sont attendues par une association à Marseille pour être soignées. Quand je les vois mon coeur se déchire. Elles ont peur, elles ont froid, elles sont épuisées, elles ont des pansements aux mains, aux jambes, l’une boite en faisant des grimaces de douleurs et l’autres ne peut pas porter son sac avec sa main blessée. J’apprendrais plus tard que l’une d’elles est la cousine de la jeune fille tuée sur l’autoroute vers Menton quelques semaines avant. Elles ne parlent ni français, ni anglais. Il faut marcher une centaine de mètres pour rejoindre ma voiture et cela prend très longtemps car l’une marche très difficilement. J’en profite pour essayer de savoir de quel pays elles sont. Erythrée. Une fois dans la voiture, je constate qu’elles n’ont jamais utilisé de ceinture de sécurité. Je suis dans l’embarras de m’approcher d’elles qui ont peur pour leur mettre la ceinture. Elles n’ont pas peur de moi mais dans leurs yeux je lis qu’elles savent que rien n’est gagné. Il ne faut pas être un génie pour comprendre qu’au long des 6000 km qu’elles ont fait pour arriver jusqu’ici, elles ont fréquenté la mort et le cortège d’horreurs qu’on n’ose imaginer. Je démarre avec à mon bord ces filles dont je dois prendre soin et que je dois amener à bon port. J’éteins la radio, la situation est suffisamment incroyable.

Nous n’arriverons pas à Nice. Au péage de la Turbie les gendarmes nous arrêtent et nous conduisent à la Police de l’Air et des Frontières. Ils m’ont séparé des Érythréennes. Ce n’est pas clair ce qu’ils ont fait d’elles mais je ne crois pas qu’elles aient été soignées. Elles auraient été renvoyées au sud de l’Italie comme ça se fait souvent. Les policiers m’ont dit qu’au moins l’une d’elle était mineure. Je n’ai pas réussi à les protéger.

Après 36h de garde à vue, j’ai été libéré sous contrôle judiciaire. Ma voiture a été saisie ainsi que mon téléphone et je n’ai pas le droit de quitter Nice sauf pour emmener mes enfants à l’école mais il n’y pas de transport en commun à moins de les réveiller à 5h30 du matin. Mon procès sera  renvoyé à une date ultérieure, à la même date que celui de Cédric Herrou membre d’associations humanitaires qui secourent les personnes en danger dans la vallée de la Roya et qui est également poursuivi pour avoir aidé des étrangers.

Le lendemain de ma libération, alors que, coup du sort, je me retrouvais à secourir un accidenté de la route qui se vidait de son sang en bas de chez moi, un “jeune migrant” est mort percuté par une voiture sur l’autoroute à Menton, il a été projeté par dessus le parapet du viaduc et a fait une chute de plusieurs dizaines de mètres. Venu du bout du monde, perdu sur l’autoroute et mort à 20 km de chez moi.

Mon geste n’est ni politique, ni militant, il est simplement humain et n’importe quel citoyen lambda aurait pu le faire et que ce soit pour l’honneur de notre patrie, pour notre dignité d’hommes libres, pour nos valeurs, nos croyances, par amour ou par compassion nous ne devons pas laisser des victimes mourir devant nos portes. L’histoire et l’actualité nous montrent suffisamment que la discrimination mène aux plus grandes horreurs et pour que l’histoire ne se répète plus, nous devons valoriser la solidarité et éduquer nos enfants par l’exemple.

Pierre-Alain Mannoni »

 

Pour plus d’information :

Facebook Roya citoyenne : https://www.facebook.com/royacitoyenne/?fref=ts

Blog Résistances en Roya : http://roya06.unblog.fr/

Blog Association pour la Démocratie à Nice : http://ademonice06.com/

Site Habitat et Citoyenneté : http://www.habitatetcitoyennete.fr/

 

royaLa Roya, 15 novembre 2016.

Alerte expulsions vers le Soudan : nouvelles de ce lundi – la mobilisation continue

21 lundi Nov 2016

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

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bidonville, Calais, Exilés, expulsions, rétention

Face à la mobilisation, la préfecture du Pas-de-Calais et le ministre de l’intérieur lâchent du lest, libérant une partie des exilés soudanais enfermés au centre de rétention de Vincennes et risquant l’expulsion pour le Soudan (voir ici, ici et là), mais en maintenant d’autres en rétention. Un vol pour Khartoum est toujours prévu pour demain.

Sur les trois personnes enfermées au CRA 2, qui n’avaient pas de vol programmé, mais ont eu un rendez-vous avec l’ambassade du Soudan pour qu’elle délivre le laissez-passer nécessaire à l’expulsion, deux ont été libérées et une reste en rétention.

Dans le CRA 3, Ibrahim ainsi qu’une autre personne qui n’avait pas encore de vol programmé ont été libérés. Par contre, Baker est maintenu en rétention et a un vol programmé pour demain 21h20 avec changement à Doha.

http://www.parisaeroport.fr/passagers/les-vols/vols-depart/D_C11?ckey=20161122CDQR%20038%20%2020161122DOH

(Comme la taille des centres de rétention est plafonnée à 140 places, qui semble pour le ministère de l’intérieur la limite de ce que serait une « taille humaine », les grands centres de rétention sont formés de plusieurs centres plus petits et théoriquement indépendants. Le centre de rétention de Vincennes est ainsi formé de unités, CRA 1, CRA 2 et CRA3, pour un total de 178 places).

Il est donc important de continuer à relayer l’action d’Amnesty International pour obtenir l’annulation de l’expulsion et la libération de Baker :

https://www.amnesty.fr/refugies-et-migrants/actualites/france-deux-personnes-bientot-renvoyes-dans-un-pays

« Nous avons besoin de toute urgence de votre aide.
Deux jeunes hommes Soudanais, Ibrahim et Baker, risquent d’être expulsés à tout moment par la France vers des zones de conflit au Soudan.
Ibrahim a d’ailleurs déjà un vol prévu pour demain samedi [vol annulé, mais un autre vol est programmé pour mardi].

Aidez-nous à renforcer notre pression auprès du Ministre de l’Intérieur pour qu’il décide d’interrompre la procédure d’expulsion.

Vous pouvez interpeller le ministre via Twitter
Ou/et adresser le message ci-dessous à Bernard Cazeneuve : sec.immigration@interieur.gouv.fr
N’oubliez pas de nous mettre en copie: scampagne@amnesty.fr

Merci de votre aide

Monsieur le ministre,
Je vous écris pour vous demander d’interrompre l’expulsion de deux ressortissants Soudanais, Ibrahim C et Baker A, actuellement détenus au centre de rétention de Vincennes et pouvant faire l’objet à tout moment d’un éloignement du territoire.
Ibrahim C et Baker A sont respectivement originaires du Darfour et du Kordofan du Sud, deux Etats du Soudan où la guerre sévit depuis des années, et où les civils sont victimes de violations graves de leurs droits humains. S’ils sont renvoyés vers Khartoum, Ibrahim C et Baker A risquent en outre de subir des mauvais traitements de la part des services de sécurité soudanais.
La France est tenue, en vertu de la convention de 1951 relative au statut des réfugiés et de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, de ne pas renvoyer des personnes vers des pays où elles seraient exposées à des risques de violations graves de leurs droits humains.
Je vous remercie par avance de prendre en compte ma demande en interrompant les procédures d’expulsion en cours.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le ministre, l’expression de ma haute considération. »

 

trouver-tuyauxDessin Paul Gendrot.

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