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Le problème, dans les villes, c’est les pauvres. Certains, sans logis, on l’outrecuidance de dormir dehors au vu et au su de tout de le monde. Alors, pour y remédier, il y a les dispositifs anti-dormir-là. Il y a bien sûr les grilles pour fermer certains espaces, tout un tas de choses pointues ou anguleuses qui empêchent de s’allonger sur le sol, ou ces élégantes choses qui pourraient ressembler à des accoudoirs et segmentent les bancs publics pour empêcher de s’y coucher. Ce matin, des blocs de pierre irréguliers ont été disposés sur un replat à côté de l’entrée du « camp humanitaire » de la porte de la Chapelle, à Paris.
https://goo.gl/maps/YzAmSbEUhjN2
En effet ce camp ridiculement sous-dimensionné de 400 places accueille pour une durée maximale de 10 jours, soit 40 entrées par jour. Les personnes non-admises, celles qui veulent être parmi les 40 premières à l’entrée le matin, dorment aux alentours, à la belle étoile ou à l’abri du pont des voies de chemin de fer. Parfois des montants fait de ce qu’on a pu trouver recouverts de couvertures esquissent une cabane.
Plus loin, en passant le périphérique, sur la Plaine Saint-Denis, des couchages sur des bancs (non munis d’accoudoirs anti-dormir-là) s’imbibent d’eau sous la bruine matinale. Rafle du matin ou personnes ayant laissé là leurs affaires pour tenter leur chance à l’entrée du « camp humanitaire » ? Sur une pelouse, des rectangles d’herbe jaunie, un morceau d’arceau de tente, un carton gorgé d’eau, marquent qu’il y avait là un campement. Depuis l’annonce de la création du « camp humanitaire », six mois avant son ouverture effective, les destructions de campements d’exilé-e-s, les rafles et les violences se sont aggravées (voir ici, ici, ici, ici et là), entraînant des déplacements vers la banlieue. Alors la politique de déguerpissement de tout ce qui peut ressembler à un campement a aussi passé le périphérique.
« Nu suntem praf » – « nous ne sommes pas de la poussière ». Revenu côté Paris, en longeant le boulevard Ney à l’ouest de la porte de la Chapelle, une fois passé sous le pont des voies de chemin de fer, cette banderole en roumain à côté d’autres en français parlant d’expulsion, accrochées aux grilles du chemin de fer de ceinture. En contrebas, deux rangées de cabanes de chaque côté d’une allée centrale sur l’emprise désaffectée de la voie de chemin de fer, un camp de Rrom-e-s en instance d’expulsion. Même politique de destruction qui pousse les personnes un peu plus loin – généralement pas trop loin, parce qu’un voisinage c’est l’école des enfants, le médecins traitant, des possibilités de travail, un tissu de liens pour des personnes souvent depuis plusieurs années en France.
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Adolpho Arellano : Le Paradis.