Ce matin a eu lieu une expulsion de personnes exilées sous les ponts à Calais (pont Faidherbe et pont Mollien). En effet, suite aux expulsions du 10 et 30 juillet dernier, des personnes ont commencées à vivre sous les ponts. Leur nombre a progressivement augmenté du fait des expulsions successives.

08 : 17 : l’équipe Human Rights Observers (HRO), qui observe quotidiennement les pratiques policières à Calais, est sur place. Au moins 9 voitures de CRS, 2 voitures de gendarmes, et 3 voitures de la police nationale sont également présentes. Le périmètre de sécurité est plus large que d’habitude. 

On peut entendre à la radio d’un policier « 14 migrants mis à l’abri. 13 soudanais et 1 lybien. ».

Cette expulsion n’étonne pas. Le 16 décembre dernier avait été affiché sous le pont Georges V, pont Faidherbe, pont Mollien, un référé de la Commune de Calais avec un avis d’audience pour le 23 décembre. Pour l’avocat de la commune, « l’État, le Département, certaines associations et surtout la Commune travaillent activement à la gestion responsable de cette crise en recherchant la meilleure solution possible ». La solution proposée : une action aux fins d’expulsion. 

Pour l’avocat de la défense, « chaque expulsion renforce la déjà très grande précarité de leur situation matérielle et nourrit un très vif sentiment d’abandon par les autorités ». Le jour même de l’audience, le juge rend sa décision, « il est enjoint aux occupants sans titre […]  de libérer les lieux sans délais ». 

Ce matin, pour les forces de l’ordre présentes, « ce n’est pas une expulsion, mais une opération de mise à l’abri. ». 

« Pourquoi des forces de l’ordre, alors ? », se questionne l’équipe HRO. 

8 : 54 : le premier bus observé par l’équipe HRO part. Escorté par une voiture de gendarmerie. 

Mohammed[1], dans un des bus, se questionne : « il y a une loi pour ça ou juste une politique de harcèlement ? ».  Le traducteur présent n’est apparemment au courant de rien et ne sait pas où vont les bus. 

9 : 00 : le périmètre de sécurité est subitement élargi pour l’équipe HRO qui est violement écartée, leur empêchant de faire leur travail et d’observer le déroulement des opérations.

« Il y avait de l’espoir » déclare Mohammed.

9 : 35 : un deuxième bus part, toujours escorté par une voiture de gendarmerie. Suivi par un troisième bus. Encore une voiture de gendarmerie.

« Que va-t-il se passer ? » demande Mohammed. Pour le juge du TA de Lille, « l’État […] met en œuvre à Calais un dispositif humanitaire en faveur de la population migrante, garantissant notamment une mise à l’abri ».

Sur le pont Faidherbe, on peut compter 10 voitures de CRS, 1 voiture de la police nationale, 1 voiture de gendarmerie, la protection civile et 2 voitures banalisées.

10 : 30 : L’équipe de nettoyage arrive et débarrasse le terrain de tout ce que les personnes possédaient, alors que l’équipe HRO est violemment escortée hors de la zone. 

Vers 11 : 30 : fin de la ‘mise à l’abri’, de l’expulsion, du dernier lieu de vie de la communauté soudanaise à Calais. D’après les observations de l’équipe HRO, on peut comptabiliser le départ de 5 bus avec au moins 90 personnes expulsées, sans certitude de la destination.

Nous dénonçons ces « mises à l’abri » comme une imposture. Il n’est offert aux personnes exilées aucune solution d’hébergement pérenne et inconditionnelle. En fonction de leur statut administratif, ces dernières seront largement expulsées des hébergements qu’elles n’ont pas sollicité dans les prochains jours. De fait, les exilé.e.s sont harcelé.e.s quotidiennement, leurs lieux de vie sont inlassablement détruits, leurs abris et biens personnels confisqués. Nous exigeons l’ouverture d’un hébergement inconditionnel à Calais.

Contact presse 

Sandra, Human Rights Observers : +33 6 68 02 32 34

Margot, Cabane Juridique : +33 6 08 45 02 54


[1] Nom volontairement modifié