• Accueil
  • À propos
  • Documents
  • Liens
  • Le point sur
  • Les cahiers
  • Newsletter

Passeurs d'hospitalités

~ des exilés à Calais

Passeurs d'hospitalités

Archives de Tag: santé

Bidonville de Calais : le Conseil d’État confirme le jugement du tribunal administratif

23 lundi Nov 2015

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 14 Commentaires

Étiquettes

Asile, bidonville, Calais, droits, Exilés, logement, mineurs, santé, solidarité

Des habitant-e-s du bidonville de Calais, Médecins du Monde et le Secours catholique avaient saisi le tribunal administratif en référé (donc selon une procédure d’urgence) en raison de la carence de l’État et de la mairie à apporter des solutions à la situation des exilé-e-s vivant dans le bidonville de Calais.

Le tribunal avait écarté la plupart de leurs demandes, mais avait néanmoins ordonné à l’État et à la commune un minimum en terme d’accès à l’eau potable, de ramassage des déchets et de sanitaires, d’accès pour les secours, ainsi que de recensement des mineurs en danger.

Ce minimum était encore trop pour l’État et la commune, qui ont fait appel.

Le Conseil d’État a confirmé aujourd’hui le jugement du tribunal administratif.

http://www.conseil-etat.fr/Actualites/Communiques/Migrants-a-Calais

Il faudra suivre la manière dont l’État et la commune appliqueront cette décision de justice.

Mais au-delà des questions subsistent.

« Il a relevé que les autorités publiques font actuellement et continueront à faire dans les prochains mois de nombreux efforts pour l’hébergement ainsi que pour la prise en charge sociale, médicale et psychologique des personnes les plus vulnérables vivant sur le site. Il a estimé,  dans ces conditions, que le juge des référés du tribunal administratif avait eu raison de juger que des mesures de sauvegarde n’étaient pas nécessaires sur ce point. » : le Conseil d’État comme le tribunal administratif considère que les mesures prises ou annoncées par l’État seront suffisantes. L’avenir nous le dira, mais on peut en douter, surtout si après une diminution probable du nombre de nouvelles personnes arrivant à Calais pendant l’hiver, ce nombre augmentait à nouveau à partir du printemps. Les juges semblent se contenter d’une absence d’anticipation, et de mesures palliatives tardives et insuffisantes.

« Il appartient en tout état de cause aux autorités titulaires du pouvoir de police générale, garantes du respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité humaine, de veiller, notamment, à ce que le droit de toute personne à ne pas être soumise à des traitements inhumains ou dégradants soit garanti » : on peut douter que les mesures a minima ordonnées par le juge soient suffisantes vu la gravité de la situation. Certes le juge des référés a une compétence limitée aux mesures d’urgence, mais dans ce cas il faut pousser la démarche juridique plus loin pour que les autorités remplissent leurs obligations.

« Il a alors estimé, tout comme le juge des référés de première instance, qu’aucune carence caractérisée ne pouvait être reprochée aux autorités publiques en ce qui concerne la nutrition des personnes présentes sur le site : le centre « Jules Ferry » distribue des repas et de nombreux migrants pourvoient à leurs besoins  alimentaires soit grâce aux associations présentes sur le site, soit par leurs propres moyens » : c’est finalement l’action des associations qui permet à l’État de ne pas être condamné sur ce point. Ambiguïté qui n’est pas simple à résoudre. Ce n’est pas qu’une question de calories, il y a une différence qualitative entre la solidarité citoyenne qui s’exprime à travers les associations et les services mis à en place par l’État dans des lieux entourés de grilles et dont l’accès est interdit aux citoyens, comme le centre Jules Ferry et le futur camp de containers de 1500 places annoncé par le premier ministre.

 

Le gouvernement est contre les points d’eau et la protection des mineurs

16 lundi Nov 2015

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 11 Commentaires

Étiquettes

Asile, bidonville, Calais, droits, Exilés, logement, mineurs, santé, solidarité

Des habitant-e-s du bidonville de Calais, le Secours catholique et Médecins du Monde avaient saisit le tribunal administratif de Lille pour obtenir des mesures d’urgence pour faire cesser un certain nombre de violations de leurs droits. Le tribunal leur avait donné gain de cause et avait ordonné des mesures a minima : des points d’eau et des toilettes supplémentaires, une collecte des déchets et un nettoyage du site, des accès pour les secours, et un recensement des mineurs en vue de saisir l’Aide Sociale à l’Enfance.

Des mesures insuffisantes pour faire cesser la situation scandaleuse qu’est l’existence de son bidonville, mais permettant d’y apporter un minimum de salubrité. Et un premier pas pour trouver une réponse à la situation des centaines de mineurs habitant le bidonville.

L’État a d’abord réagit en disant que ces mesures étaient de toute façon prévues.

Il a ensuite, le 12 novembre, fait appel de la décision du tribunal administratif, arguant qu’il avait déjà satisfait à ses obligations vis-à-vis des habitant-e-s du bidonville de Calais, et qu’il n’avait aucune obligation légale à faire plus.

Vous pouvez télécharger le mémoire en appel du ministère de l’intérieur ici.

Derrière la situation particulière du bidonville de Calais, le gouvernement tente de faire avaliser par la justice qu’il n’a pas d’obligations vis-à-vis de situation de détresse sociale criante, et que l’action qu’il pourra mener ne peut dépendre que de son bon vouloir.

Mais si l’État n’a plus d’obligations en terme de solidarité et n’a pas pour mission de faire cesser des situations assimilables à des traitements inhumains et dégradants, pourquoi et pour qui payons-nous des impôts ?

 

Jugement du bidonville d’État : un pétard mouillé

03 mardi Nov 2015

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 14 Commentaires

Étiquettes

Asile, bidonville, Calais, droits, Exilés, logement, mineurs, santé, solidarité

Le juge des référés du tribunal administratif de Lille avait été saisi par des habitants et habitantes du bidonville de Calais et par Médecins du Monde et le Secours catholique de la situation des personnes qui habitent le bidonville, pour enjoindre à l’État, à la commune de Calais et à l’Agence Régionale de Santé de prendre des mesures et d’y apporter remède. L’audience a eu lieu jeudi dernier, le jugement a été rendu rendu hier lundi.

Vous pouvez télécharger une version anonymisée du jugement ici.

Il s’agit d’un jugement en entonnoir, qui valide un constat, mais débouche sur peu de choses concrètes.

1. Le jugement valide le constat de la situation, son caractère d’urgence et la carence des pouvoirs publics en des termes particulièrement clairs.

2. Il rappelle les compétences du juge des référés et leurs limites. Il décide rapidement et sur des mesures d’urgence, exécutables rapidement. Il écarte donc des demandes importantes, parce qu’elles ne relèvent pas de sa compétence : le recensement des bâtiments vides et terrains vacants pouvant servir à reloger les habitant-e-s du bidonville, les mesures permettant l’accès à l’information sur l’asile et l’accès aux droits des demandeur-se-s d’asile.

3. Il considère que les éléments apportés par l’État et l’Agence Régionale de Santé sont suffisants en ce qui concerne l’hébergement des demandeurs d’asile, l’accès à la santé et la mise à l’abri des personnes vulnérables, et que les mesures pour répondre à la situation sont prises ou vont l’être, en l’absence d’éléments contradictoires apportés par les associations et les habitant-e-s. On se dit bien que ce que l’État est en train de mettre en place est insuffisant, désordonné et parfois inquiétant, mais encore aurait-il fallu apporter des éléments concrets au juge.

À ce stade, il ne reste plus grand chose des demandes des associations et des habitant-e-s.

4. Il enjoint à la préfecture de recenser les mineurs isolés « en situation de détresse » et de « se rapprocher du département du Pas-de-Calais en vue de leur placement ». En effet, c’est l’Aide Sociale à l’Enfance qui est compétente en matière de protection de l’enfance, et les associations et habitant-e-s ne l’ont pas citée à comparaître. Donc le tribunal ne peut rien lui enjoindre.

5. Reste au final une série de mesures qui vont certes rendre le bidonville moins insalubre, ce qui est toujours bon à prendre, mais ne va pas résoudre le fond du problème : 10 points d’eau de 5 robinets, 50 latrines, un système de collecte des déchets, un nettoyage du site, des accès pour les secours, à mettre en place dans les 8 jours.

En résumé, par rapport aux demandes qui étaient faites, ce n’est pas le bon juge qui a été saisi pour tout ce qui ne relève pas de mesures d’urgence, l’Aide Sociale à l’Enfance n’a pas été citée alors que c’est elle qui est compétente par rapport aux mineurs, les mesures insuffisantes et incohérentes de l’État concernant les demandeurs d’asile et la santé n’ont pas été contredite par les associations.

Si on en reste là, la démarche aura débouché sur pas grand chose.

Mais il est possible aussi de saisir le juge du fond (qui ne juge pas que de l’urgence) pour ce qui concerne les mesures à plus long terme; d’avoir un regard critique sur le recensement des mineurs qui doit faire la préfecture et d’interpeller l’Aide Sociale à l’Enfance, peut-être avec des propositions, pour ce qui est des mineurs; d’évaluer les mesures prises par l’État concernant l’accès à la santé et l’hébergement des demandeurs d’asile.

Mais l’hiver approche, et concernant la simple mise à l’abri des personnes, le jugement du tribunal administratif de Lille n’apporte rien.

 

Bidonville d’État : des habitants et deux associations saisissent la justice

26 lundi Oct 2015

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 12 Commentaires

Étiquettes

Asile, bidonville, Calais, droits, Exilés, logement, santé, solidarité

Face au pourrissement de la situation voulu par l’État, aux mesures insuffisantes qui font diversion par rapport à l’aggravation de la répression, aux rafles et aux placements en rétention, aux multiples violations des droits qui en découlent, et qui ont été constatées par le Défenseur des Droits, des habitants du bidonville, Médecins du Monde et le Secours catholique ont saisi le tribunal administratif en référé (procédure d’urgence). Le but est que l’État prenne enfin des mesures pour les droits et la dignité des personnes soient respectés.

http://www.lemonde.fr/immigration-et-diversite/article/2015/10/26/deux-ong-demandent-en-refere-que-l-etat-prenne-des-mesures-d-urgence-a-calais_4796732_1654200.html

Vous pouvez télécharger le communiqué de Médecins du Monde et du Secours catholique ici.

 

Réponse du Défenseur des droits au ministre de l’intérieur

20 mardi Oct 2015

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 10 Commentaires

Étiquettes

bidonvilles, Calais, discriminations, Droits de l'homme, Exilés, mineurs, santé, violences policières

Gare de Calais, mardi 20 octobre. Le train de Paris arrive. Quatre policiers sont sur le quai. Ils font un contrôle au faciès, donc illégal, parmi les voyageur-se-s qui descendent du train. Deux personnes à la peau noire, une famille avec deux enfants, deux autres personnes dont l’habillement peut faire penser qu’il s’agit de « migrants », sont stoppées, contrôlées, palpées, les bagages fouillés. Les autres passager-ère-s, à l’air « européen », passent sans être contrôlé-e-s.

Le quotidien des pratiques illégales de la police en gare de Calais.

Après une première décision en 2012 sur le harcèlement policier, le Défenseur des droits vient de publier un nouveau rapport sur les discriminations et les violences dont sont victimes les exilé-e-s à Calais du fait de la politique des autorités. Comme son prédécesseur en 2012, le ministre de l’intérieur lui a adressé une réponse méprisante, qui est aussi une fin de non recevoir.

Le Défenseur des droits y répond, par une tribune dans Libération qui resitue son rôle et son approche de la situation calaisienne, et par une note de 11 pages reprenant avec patience et point par point les « arguments » du ministre.

Vous pouvez télécharger le rapport du Défenseur des droits ici.

Vous pouvez télécharger les recommandations du Défenseur des droits ici.

Vous pouvez télécharger la réponse du ministre de l’intérieur ici.

La tribune du Défenseur des droits dans Libération peut être lue ici :

http://www.liberation.fr/debats/2015/10/19/jacques-toubon-defendre-les-droits-a-calais-aussi_1407384

Vous pouvez télécharger l’«analyse des éléments de réponse du ministre de l’intérieur» par le Défenseur des droits ici, et la lire ci-dessous.

 

http://www.defenseurdesdroits.fr/fr/actualites/analyse-des-elements-de-reponse-du-ministre-de-linterieur-sur-le-rapport-exiles-et-droits

« Analyse des éléments de réponse du ministre de l’Intérieur sur le rapport « Exilés et droits fondamentaux : la situation sur le territoire de Calais »

20 Octobre 2015

Par un courrier en date du 14 octobre 2015[i], le ministre de l’Intérieur a réagi à la publication du rapport publié par le Défenseur des droits le 6 octobre précédent[ii].

Sur le fond, M. Toubon a pu exprimer son point de vue dans une tribune rendue publique ce jour.

La présente note a plus simplement pour objet de revenir sur les allégations d’erreurs factuelles qui seraient présentes dans le rapport.

Au préalable, on rappellera que les éléments développés dans le rapport publié le 6 octobre sont le fruit d’instructions contradictoires et de visites sur place menées mi-juin et mi-juillet 2015:

  • Déontologie de la sécurité : documents obtenus dans le cadre de demandes de communications de pièces auprès des autorités compétentes (DGPN, etc.) ;
  • Centre hospitalier et enfants : visites sur place, instructions classiques auprès du Centre hospitalier, du Procureur, de France Terre D’Asile ;
  • Hébergement et asile : visites sur place et renseignements donnés par la Vie Active et l’AUDASSE, associations agissant pour le compte de l’État.

1/ Sur les « violences policières » (pp. 9 et 10 du courrier)

Les « violences policières » que le Défenseur des droits impute aux forces de l’ordre seraient formulées « dans des termes très généraux qui ne paraissent pas permettre d’établir des faits (…), le rapport se born[ant] le plus souvent à rappeler des éléments déclarés par d’autres associations ou institutions que le ministère de l’Intérieur a déjà eu l’occasion de démentir » (p9, dernier § et suivants).

Le rapport expose longuement les raisons pour lesquelles le Défenseur des droits ne se prononce pas sur les réclamations individuelles dont il a été saisi, l’instruction contradictoire de ces réclamations étant en cours. Ce faisant, le Défenseur :

  • explique les raisons pour lesquelles l’instruction de ces réclamations n’a pas abouti (pp. 68 à 71): obstacles liés à la situation calaisienne (problème d’identification des policiers, peur des migrants de porter plainte du fait de leur situation de précarité sociale et administrative, durée limitée de vie à Calais) et obstacles juridiques (notre loi impose de demander au Procureur l’autorisation d’instruire ainsi que l’ensemble des pièces des procédures, ce que justement le Procureur ne fait malgré plusieurs relances. Le Défenseur a pointé que cette obstruction était exceptionnelle, n’avait pas lieu dans la plupart des dossiers instruits en matière de déontologie de la sécurité (p.70). A cet égard, le rapport a eu un effet très positif : toutes les procédures demandées depuis des mois ont été adressées aux services il y a quelques jours) ;
  • décide de décrire ce dont il est saisi et de le remettre dans le contexte de ce qui est plus généralement décrit par d’autres institutions (voir, notamment le rapport du Commissaire aux droits de l’homme du 17 février 2015[i]) ;
  • par ailleurs, sans prendre position sur les réclamations individuelles, le rapport pointe des éléments objectifs et précis, tirés notamment d’une note de la Direction zonale des CRS Nord du 17 décembre 2014 qui mentionne qu’« il a été fréquent de recourir à des moyens lacrymogènes […] pour tenter de repousser [les migrants], la peur de l’uniforme ne suffisant plus » et que ce recours doit même être « privilégié » pour « refouler les migrants qui viennent sur la rocade ou qui viennent trop au contact ». Le ministre ne fait mention de  cette information qui parait pourtant « établir des faits ».

Le ministre ne se prononce pas non plus sur les problèmes pointés par le rapport en ce qui concerne les cadres juridiques d’intervention qui pourraient être précisés (p.79 à 81). Or, le Défenseur des droits, pour démontrer que le cadre juridique de l’emploi de la force doit être précisé, s’appuie sur la note CRS précitée pour écrire que les forces de l’ordre elles-mêmes sont conscientes du flou qui entoure leur action et sont demandeuses de précisions :

« La défense du terrain que nous devons occuper pour des raisons stratégiques ne peut pas éternellement servir de palliatif juridique, d’autant que les agissements des migrants sont connus et répétitifs. Le cadre de la réaction perd là de son sens premier ». (p.80)

Par ailleurs, le ministre rappelle que les forces de l’ordre à Calais se trouvent confrontées « à une situation exceptionnelle extrêmement difficile ».

Le rapport revient longuement sur « les missions délicates confiées aux forces de l’ordre », c’est même le titre d’une sous-partie (pp. 78-79) au cours de laquelle il est pointé le « sentiment d’usure, voire d’impuissance des personnels » ayant notamment abouti à une vingtaine d’arrêts de travail pour raison médicale en juin 2015. Le rapport pointe même qu’ « au-delà de ce sentiment d’usure, domine également un défaut de sens donné à leur action ».

Effectivement, ce contexte de tension et d’usure, d’une part, ainsi que le manque de précisions du cadre d’action, d’autre part, favorise les « débordements ».

2/ Sur l’hébergement d’urgence et le centre de transit (pp. 4 et 5 du courrier) :

Le ministre « conteste [notre] analyse juridique selon laquelle il existerait une obligation inconditionnelle pour l’Etat d’héberger indéfiniment à Calais l’intégralité des migrants en situation irrégulière qui le souhaiteraient s’ils ne sont pas vulnérables ou s’ils ne s’engagent pas dans une démarche d’asile en France ».

Le rapport n’a jamais indiqué qu’il existait une telle obligation. Toutefois, d’une part, les migrants du bidonville sont sans abri et dans « une situation de détresse médicale, psychique et sociale » qui, aux termes du Code de l’action sociale et des familles, leur donne droit à cet hébergement (s’ils n’ont pas vocation à demeurer en France, ils seront reconduits à la frontière). D’autre part, beaucoup de demandeurs d’asile vivent encore dans le bidonville[ii] même si des efforts indéniables – que nous pointons dans le rapport – ont été réalisés dans ce sens. A ce titre, rappelons que « l’évolution favorable dans la prise en charge des demandeurs d’asile dans le Calaisis » est le titre d’une partie de près de 4 pages du rapport, pp. 38 à 41)

Le ministre fait une interprétation extensive de la jurisprudence du Conseil d’Etat sur l’hébergement d’urgence, en estimant que la juridiction administrative autorise les préfets à refuser un tel hébergement à tous « les étrangers en situation irrégulière » sauf s’ils sont dans une situation de vulnérabilité particulière.

Or, les ordonnances du Conseil d’Etat ne limitent l’inconditionnalité de l’hébergement d’urgence qu’à l’égard des déboutés du droit d’asile qui ne seraient pas dans une situation de vulnérabilité particulière. Une lecture extensive de cette jurisprudence pourrait conduire à l’étendre, tout au plus, aux étrangers faisant l’objet d’une OQTF[iii] mais en aucun cas à toute personnes (potentiellement) en situation irrégulière. Cela reviendrait à soumettre à une condition de régularité de séjour l’hébergement d’urgence, ce qui est illégal. En tout état de cause, comment considérer que ces migrants, eu égard à leurs conditions de vie, ne sont pas dans une telle situation de vulnérabilité, notamment lorsqu’il s’agit de femmes et d’enfants ?

Le ministre s’appuie sur les conclusions du rapport Aribaud-Vignon pour affirmer que l’hébergement doit « demeurer une perspective, le nombre de migrants présents aujourd’hui à Calais ne permettant pas de l’envisager à court terme ».

Pages 20 et suivantes du rapport, le Défenseur des droits critique précisément le constat fait par MM. Aribaud et Vignon au regard de l’inconditionnalité de l’hébergement d’urgence telle que prévue par la loi mais aussi au regard des articles 3, 8 et 14 de la CEDH. C’est pourquoi le Défenseur a demandé un inventaire de toutes les ressources foncières publiques afin que les bâtiments inoccupés soient utilisés pour loger ces migrants, à l’instar de ce qu’avait demandé le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (p.18).

Le centre de transit annoncé par le Premier ministre le 31 août serait en cours de réalisation.

Page 20 du rapport, le Défenseur des droits pointe le caractère sous-dimensionné d’un projet prévoyant 1 500 places alors que le nombre de migrants était estimé l’été dernier à près de 4 000 personnes (ce chiffre s’élèverait maintenant à 6000 selon les dernières informations délivrées par la presse). Il préconise un hébergement des intéressés dans de véritables structures en dur et encourage plutôt la création, avant l’hiver, de structures, plus petites qui ne soient pas concentrées en un seul lieu.

Le ministre ne donne aucun élément de réponse sur ces constats et recommandations.

3/ Sur le centre d’hébergement des femmes et le centre d’accueil Jules-Ferry

Le ministre prévoit un doublement de la capacité d’accueil du centre d’hébergement des femmes et des enfants « dans le cadre de la période hivernale » (p.4 §4), ce dispositif accueillant aujourd’hui une centaine de femmes et d’enfants.

Le rapport du Défenseur des droits donne les mêmes chiffres que le ministre quant à la centaine de femmes et d’enfants hébergées (p.49) et préconise le triplement de ce nombre de places (p.58). Ces projets vont dans le sens de la recommandation du Défenseur même s’ils restent en-deçà. En revanche, les annonces récentes faites dans la presse et celles faites aux associations évoquent plutôt des projets réalisés en mars 2016, soit après la période hivernale, ce qui n’est pas satisfaisant.

Le gouvernement rappelle avoir « pris la décision d’ouvrir un centre d’accueil de jour pour mettre  à la disposition des migrants un certain nombre de prestations auxquels ils n’avaient jusqu’alors pas accès (repas, sanitaires, douches, accès à l’eau, permanence médicale) ».

Le rapport du Défenseur pointe ces améliorations dès la page 9 :

« Si la création de ce centre, doté d’un budget de 10 millions d’euros par an conjointement alimenté par l’Union européenne, la Grande-Bretagne et la France, constitue indéniablement une amélioration au regard des conditions de vie des exilés totalement démunis, cette prise en charge n’en demeure pas moins sous-dimensionnée au regard des besoins ».

4/ Sur les critiques du rapport concernant l’asile en France (pp. 5 et 6)

Le ministre reconnait que le rapport du DDD pointe les efforts entrepris par l’ensemble des services de l’Etat » et tend à « apaiser [nos] craintes » du fait de l’existence de la nouvelle loi relative à l’asile.

Il est à noter que le Défenseur des droits a fait part de ses préoccupations en deux occasions lors de l’examen par le Parlement de la récente loi asile[iv], soulignant ce qui lui semblait insuffisant en matière de protection. A cet égard, la décision de la Commission européenne d’engager une procédure d’infraction à l’égard de la France pour défaut de communication des mesures de transposition des directives pertinentes en la matière, est de nature à conforter l’analyse du Défenseur.

5/ Sur les évacuations de campements illicites (pp. 6 et 7)

Selon le ministre, les expulsions auraient été réalisées sur le fondement de décisions de justice et auraient été menées dans un souci de protection des migrants installés sur un ancien site industriel chimique en cours d’exploitation.

Le Défenseur des droits, pas plus dans ce rapport que dans les dossiers concernant l’expulsion de familles « Roms » dont il a par ailleurs à connaître, ne conteste la nécessité de procéder aux évacuations de terrains occupés sans droit ni titre ordonnées par la justice. En revanche, il s’attache à examiner les conditions dans lesquelles celles-ci sont réalisées : qu’il s’agisse des violences policières alléguées dans ce cadre (les termes du rapport sont au conditionnel, pp. 76-77) ou bien de l’absence de diagnostic social, de solutions alternatives d’hébergement et de rupture dans la continuité des droits (alors que le droit européen ainsi que la circulaire interministérielle du 26 août 2012 l’imposent).

Le ministre précise que les jugements du Tribunal administratif de Melun annulant les OQTF pour détournement de pouvoir (car elles n’auraient eu pour objet que d’évacuer le campement et non d’éloigner les migrants du territoire français) ont été annulés par décision de la Cour administrative d’appel (CAA) de Paris le 7 octobre 2015.

En premier lieu, le Défenseur des droits ayant publié son rapport le 6 octobre, cette décision ne pouvait logiquement être prise en compte dans ces travaux. Ces jugements, frappés d’appel, n’étaient pas définitifs, pas davantage que l’arrêt évoqué susceptible de faire l’objet d’un pourvoi en cassation.

Cet arrêt de la CAA de Paris n’étant pas publié, on ne peut que se fonder sur les extraits cités par le ministre pour en apprécier la portée. Or, il semble, aux vues de ces extraits, que la CAA de Paris ne se prononce pas sur le caractère infondé en droit du moyen tiré du détournement de pouvoir mais sur l’insuffisance de faits permettant d’établir l’existence d’un tel détournement de pouvoir.

Dans les faits, il convient  de rappeler que dans ces affaires, la plupart des personnes concernées par les mesures d’éloignement précitées ont été libérées du centre de rétention par le Préfet lui-même, avant l’intervention du Juge de libertés et de la détention. Il est donc, en tout état de cause, permis de douter de sa volonté d’éloigner réellement ces personnes.

6/ Sur l’offre de soins

Il peut sembler étonnant que ce soit le ministre de l’intérieur qui réponde au Défenseur sur ce sujet qui relève de la compétence du ministère de la Santé. Cette réaction tend à confirmer ce que le Défenseur a déjà pointé à plusieurs reprises : la catégorie juridique « étranger » l’emporte sur n’importe quelle autre, le gouvernement perçoit et traite ces personnes en tant qu’étranger alors qu’elles sont avant tout malades ou en besoin de protection de santé, indépendamment de leur nationalité.

Les locaux de la permanence d’accès aux soins de santé (PASS) seraient indépendants de ceux centre de dépistage du VIH (p.8 §4)

Cette remarque a également été formulée par le directeur du Centre hospitalier de Calais.

Le rapport ne porte aucun jugement sur le fait que la PASS abrite dans ces locaux ce centre, n’en tire aucune conclusion. Il donne une description purement factuelle des lieux tels qu’ils ont été présentés par le médecin coordonnateur de la PASS, sans que cela n’ait d’ailleurs suscité le moindre commentaire de notre part.

Ces locaux ne seraient pas des « préfabriqués » mais des « structures modulaires » (p.8 §4)

Outre qu’il paraît difficile de faire la différence entre ces deux types de structures temporaires, cette précision est sans incidence dans la mesure où, de la même façon, le rapport n’en tire aucune conséquence, ni positive, ni négative. Il s’agit ici de la reprise d’un terme (« préfabriqué ») couramment utilisé par les intervenants locaux.

Il est regrettable que ce souci du détail prévale sur l’ensemble des développements positifs faits sur la PASS et les recommandations tendant à ce que ses moyens soient augmentés (p.37).

En dépit des efforts fournis par le personnel médical, manifestement très investi, la consultation médicale de la PASS souffre d’une saturation quotidienne (p.32).

Selon le ministre, la PASS prendrait « en charge tous les patients qui se présentent l’après-midi, même ceux qui se présentent au-delà de l’heure de fermeture ». « L’affirmation selon laquelle seuls les patients accompagnés à la PASS par les associations seraient pris en charge n’est donc pas conforme à la réalité » (p.9 §2)

Page 32 dernier § du rapport, on lit :

« Conçue pour accueillir une file active de cinq cents patients par an, la PASS accueille désormais quatre mille cinq cents patients pour la même période. Exerçant dans la contrainte, le personnel de la PASS est parfois obligé de refuser des patients, amplifiant ainsi les renoncements aux soins. Seuls les patients accompagnés à la PASS par des associations (La Vie Active, Médecins du Monde) sont assurés d’accéder à une consultation le jour de leur venue, les associations prenant soin d’avertir le personnel de la PASS de l’urgence de la situation ».

Il ressort de ce passage que le rapport n’a jamais affirmé ce que le ministre présente comme étant nos conclusions. Il est même tout à fait logique que, dans la mesure où il arrive que tous les patients ne puissent être pris en charge, des associations telles La Vie Active ou MDM puissent signaler aux médecins de la PASS plusieurs cas qui méritent selon elles un traitement en urgence et qu’il soit fait droit à cette demande.

Par ailleurs, c’est leur interlocuteur local qui a expliqué à trois agents assermentés du Défenseur des droits que les choses se déroulaient ainsi.

Les infirmiers viendraient désormais le matin et l’après-midi au centre Jules-Ferry selon le ministre et ce, depuis le 31 août.

Au vu des vérifications réalisées auprès des acteurs locaux le 15 octobre, il s’agit d’une organisation datant d’une semaine, soit postérieure à la publication du rapport du Défenseur (ce serait 10h-15h30 pour les hommes ou femmes non hébergées et 15h30-17h pour les femmes mises à l’abri). Auparavant, la présence était de 3 heures le matin, dont une heure pour les femmes mises à l’abri dans Jules-Ferry.

Par ailleurs, il est erroné d’écrire qu’une permanence médicale est installée à Jules-Ferry, seule une permanence infirmière y fonctionnant. La création d’une « permanence d’accès aux soins de santé mobile intervenant au sein du bidonville » est en revanche une recommandation du rapport (p.37).

L’offre en soins dentaires serait une exception dans une PASS (p.9, §1)

Le rapport décrit cette offre en des termes plutôt valorisants mais estime qu’au regard des besoins (près de 4 000 personnes en situation de très grande précarité), cette offre d’une demi-journée par semaine reste insuffisante (p. 33).

« Les soins dentaires sont assurés dans un local équipé et dédié à cet effet par un chirurgien-dentiste présent une matinée par semaine. Le praticien peut néanmoins donner un rendez-vous sous sept jours pour les soins les plus urgents. En attendant cette échéance, les infections et les douleurs dentaires sont prises en charge en consultation médicale. Il n’en reste pas moins que les moyens matériels et humains restent insuffisants pour faire face à l’importance de la demande ».

C’est dans ce sens que le Défenseur préconise une augmentation des moyens de la PASS, recommandation que ne relève pas le ministre de même qu’il passe sous silence les problèmes liés au défaut de protection maladie pointé par le rapport (p.34).

« À défaut d’une couverture maladie, les migrants n’ont pas accès à la médecine de ville, ce qui permettrait de désengorger de facto les services de la PASS et du centre hospitalier. Plus globalement, cette absence de prise en charge par l’assurance maladie implique qu’ils ne sont éligibles qu’aux seuls soins urgents et vitaux – c’est-à-dire ayant un caractère inopiné – ce qui exclut le traitement de toute affection de longue durée ».

Selon le ministre, le système d’identification des patients jugé « indigne » par le Défenseur « renvoie à la procédure PG/DQA/002 applicable au 5 janvier 2013 visant à identifier administrativement les patients inconscients ou désorientés et non accompagnés et que le centre hospitalier applique, par extension, aux migrants qui refusent de décliner leur identité » (p. 9 §3).

Si cette procédure d’indentification s’entend bien évidemment pour les patients dans l’incapacité de décliner leur identité, elle ne saurait aboutir à faire mention de noms portant atteinte à leur dignité. Or, c’est bien un interlocuteur de la PASS, qui a indiqué aux services du Défenseur le 15 juin 2015 que des noms de fruits, de légumes ou d’animaux pouvaient être donnés, information que nous avons pris le soin de revérifier auprès d’un autre intervenant de la PASS lors d’un entretien de 2 heures qui s’est déroulé le 20 juillet 2015. Ce médecin nous a indiqué désapprouver de telles méthodes. Depuis, les associations locales nous ont confirmé que d’autres termes du type « bidule » ou « machin » pouvaient également être utilisés.

Le ministre justifie cette pratique à l’égard des migrants qui refusent de décliner leur identité. Nos interlocuteurs locaux nous ont au contraire fait part d’un « présupposé » à l’égard des migrants, conduisant les services de l’hôpital à anticiper que les intéressés ne donneraient pas leur véritable nom et qu’il convenait dès lors de leur attribuer cette identification provisoire qui, en réalité, n’a rien de provisoire. En effet, contrairement à une personne arrivée inconsciente à l’hôpital et qui a de fortes probabilités d’être identifiée avant sa sortie, le migrant à qui l’on attribue une « fausse » identité la gardera jusqu’à sa sortie et lorsqu’il reviendra à l’hôpital s’en verra attribuer une autre. Au regard du droit au suivi médical dont doit pouvoir bénéficier tout patient, ceci n’est absolument pas satisfaisant.

7/ Sur les infrastructures

Il ressort des dernières confirmations obtenues des associations locales le 16 octobre 2015, les éléments de réponse suivants :

Des chemins d’accès auraient été « aménagés pour assurer l’accessibilité aux véhicules de secours ».

Les seuls chemins aménagés par les pouvoirs publics sont ceux qui partent de la rue des Garennes sur 200 à 300 m, les chemins intérieurs au bidonville ayant été réalisés par les migrants et les associations. Il n’y a pas d’autres chemins et il nous a été confirmé que les secours n’entrent toujours pas dans le bidonville[v]. Seuls quatre points d’extraction des éventuels blessés existent aux abords (à l’extérieur du bidonville) et sont les lieux où doivent être amenés les migrants malades pour être pris en charge par les secours. A cet égard, certaines associations envisagent de former des personnes aux premiers secours et au transport de blessés.

L’ouverture du centre Jules-Ferry aurait lieu de 10h30 à 19h30 selon le ministre.

Les horaires de Jules-Ferry ont changé lundi 5 octobre, la veille de la sortie du rapport, pour prendre en compte la période hivernale. Les horaires de distribution de repas ont donc été avancés à 15h et le centre ouvre, depuis moins de 10 jours, de 9h à 17h. Il n’a jamais été ouvert de 10h30 à 19h30 comme l’indique le ministre.

Il y aurait quinze robinets et non trois selon le ministre

Il existe bien trois points d’eau sur le bidonville chacun avec plusieurs robinets (environ cinq). Il est vrai que le rapport cite en un endroit l’existence de trois robinets, ce qui est en effet une coquille puisque dans tous les autres développements suivants sont bien évoqués (y compris dans les recommandations) les points d’eau et non les robinets au motif qu’ils doivent être répartis de manière à limiter au maximum la distance à parcourir pour y accéder (pp. 25-26). Il est clair, à la lecture du rapport que ce sont bien les trois points d’eau qui sont insuffisants eu égard au nombre de personnes présentes sur le site, le nombre de robinets disponibles étant d’une importance relative.

Un éclairage public de nuit aurait été installé selon le ministre

Cet aménagement est en effet intervenu depuis le 14 juillet, soit postérieurement à notre première mission (effectuée les 16 et 17 juin) qui avait justement pour but de faire le point sur l’ensemble de ces infrastructures. La seconde mission, dépêchée le 20 juillet, avait pour objectifs de traiter de la situation des enfants et de l’accès aux soins et, par suite, n’a pas, il est vrai, procéder à une nouvelle vérification de tous les points relevés en juin. L’affirmation contenue dans le rapport était donc exacte à la date du constat effectué par nos soins. Nous aurions dû en effet procéder à une mise à jour.

Nombre de bennes et ramassage des ordures selon le ministre et la maire de Calais

Le ministre évoque l’existence de quatre bennes de 20m3, une autre benne en construction, un ramassage à l’extérieur et à l’intérieur de la dune. La maire évoque quant à elle trois bennes de 15m3 et le projet d’installation d’une autre.

Selon les informations vérifiées le 16 octobre, il y a bien trois bennes (parfois une ou deux supplémentaires) à l’extérieur du bidonville et qui sont vidées régulièrement. Depuis une dizaine de jours environ, il y a un ramassage à l’intérieur du bidonville qui est financé par Médecins Sans Frontières. Des intérimaires font des rondes dans le bidonville, fournissent des sacs poubelles et ramassent les sacs pleins. Sur ce dernier point, l’affirmation du ministre selon laquelle « les services de la ville de Calais procèdent à un ramassage des ordures (…) à l’intérieur de la lande » est donc erronée.

Précisions ministérielles sur le nombre de toilettes

Dans le rapport, nous n’avions pas mentionné de chiffre sur ce point, les choses étant en évolutions et les informations données pas suffisamment fiables. Il convient de noter que le ministre indique qu’ « il est prévu d’installer 9 blocs de WC ». Selon des informations croisées datant du 15 octobre, l’Etat a installé dans le courant du mois de juillet 12 latrines chimiques à l’entrée  du bidonville rue des Garennes et 12 latrines chimiques sur le chemin de Dunes. Depuis lors, Solidarités International en a installé 15 qui viennent d’être remplacées par des 44 latrines chimiques installées par Médecins Sans Frontières. Sur ce plan aussi, l’initiative privée et associative est plus importante que la prise en charge des pouvoirs publics.

*

Au regard de l’ensemble des éléments de cette note, il semble donc que « ce sujet sensible et difficile » ait été traité, contrairement à ce qu’affirme le ministre, différemment que par une simple « compilation d’éléments, souvent imprécis, voire inexacts » mais en se fondant au contraire sur une analyse et une connaissance sérieuses du sujet, fruit de recherches, d’instructions et de visites sur place.

Ces écrits rappellent la réaction qu’avait suscitée la décision du Défenseur des droits n°2011-113 en date du 13 novembre 2012 par laquelle l’institution avait pointé des pratiques des forces de l’ordre (harcèlement et humiliations à l’égard des migrants). La réponse du ministre de l’Intérieur, Manuel Valls fait écho à celle que le Défenseur vient de recevoir.

Le ministre jugeait en effet, le 6 mars 2013, que le Défenseur des droits, s’appuyait sur des faits « non vérifiables » et « anciens » et ce, en ces termes : « les faits annoncés dans votre décision reposent essentiellement sur des déclarations de responsables d’associations rapportant des propos non vérifiables et concernant des faits anciens qu’aucun élément objectif ne peut soutenir aujourd’hui ». Et de rajouter que les plaintes existant n’avaient établi aucun « manquement aux règles disciplinaires et déontologiques » de la police et n’avaient donné lieu à aucune poursuite judiciaire.

On sait depuis que les instances européennes et internationales ont repris à leur compte les conclusions du Défenseur.

De façon plus positive, il est manifeste que le rapport du Défenseur des droits a d’ores et déjà contribué à faire évoluer certaines choses. Hormis les améliorations postérieures à la publication du rapport comme le doublement de la présence infirmière au centre Jules-Ferry, deux exemples peuvent être donnés :

  • Le Procureur de Boulogne-sur-Mer a transmis le 12 octobre 2015 toutes les procédures en attente, ce qui permettra d’être enfin en mesure de traiter ces affaires même si le retard pris par cette obstruction risque de rendre l’instruction plus difficile à mener (déperdition des preuves, départ des intéressés, etc.) ;
  • La mission sanitaire qui a été missionnée sur place le 14 octobre 2015 pour rendre des conclusions sous 8 jours a clairement expliqué aux associations « médicales » et aux autres interlocuteurs locaux concernés par la question sanitaire, que leur venue était directement liée au rapport du Défenseur des droits.

Enfin quant à l’analyse de la situation de Calais dans le contexte plus général de la situation des exilés en Europe, le ministre rappelle que « les propositions que la France a formulées alors ont préfiguré les décisions qui ont été prises ces dernières semaines au niveau européen » notamment à l’égard « des personnes en besoin manifeste de protection » qui doivent être relocalisées de manière équitable dans les autres Etats-membres.

Si le rapport relève à plusieurs reprises l’intérêt qui s’attache au système de relocalisation initié par la France et l’Allemagne, il constate que cela n’a pas eu d’impact sur les personnes présentes à Calais et ayant pourtant un besoin manifeste de protection.

Voir, par exemple, p. 45 du rapport : « En atteste d’ailleurs le fait que, si les décisions de « relocalisation » des demandeurs d’asile peuvent être jugées pertinentes en termes de volonté de rendre solidaire le traitement des demandes d’asile, elles sont néanmoins restées sans effet sur la résorption des regroupements de migrants aux frontières de l’Europe, à Calais en particulier ».

Ces dispositifs de relocalisation sont même mis en avant pour étayer nos recommandations tendant à la suspension de Dublin puisque, par définition, les règles de Dublin ne sont pas appliquées lorsqu’on « redistribue » les exilés sur le territoire européen en les relocalisant :

« Les dispositifs de relocalisation des demandeurs d’asile sur lesquels les États membres essaient aujourd’hui de s’accorder révèlent actuellement la prise de conscience par ces derniers des effets pervers induits par le règlement Dublin et de la nécessité de développer, au sein de l’Union, les mécanismes de solidarité indispensables au développement d’une véritable politique d’asile commune. Ils laissent néanmoins sans réponse la question des entraves portées au droit d’émigrer par le renforcement toujours accru des frontières extérieures de l’Europe » (p.45).

A cet égard, la critique relative à la recommandation de suspendre Dublin « qui revient à nier la crise migratoire actuelle » (p.6 §1 du courrier) est excessive : les choix opérés notamment par l’Allemagne de suspendre temporairement son application et les résolutions du Parlement européen du 8 septembre 2015 attestent que les recommandations du Défenseur des droits ne sont pas déconnectées de la réalité et qu’elles sont au contraire préconisées ou même réalisées ailleurs.

[i] http://www.interieur.gouv.fr/Le-ministre/Interventions-du-ministre/14.10.2015-Courrier-de-Bernard-Cazeneuve-a-Jacques-Toubon-Defenseur-des-droits-sur-la-situation-des-migrants-a-Calais

[ii] Exilés et droits fondamentaux : la situation sur le territoire de Calais

[i] http://www.2idhp.eu/images/rapport-nils-muiznieks-discours-haine_150612.pdf

[ii] A notre connaissance, au moins 100 demandeurs d’asile sont sans solution d’hébergement depuis plusieurs semaines.

[iii] OQTF : Obligation de quitter le territoire français

[iv] Audition du Défenseur des droits sur le projet relatif à la réforme de l’asile, Assemblée nationale, 6 novembre 2014

Avis du Défenseur des droits sur le projet relatif à la réforme de l’asile, Sénat, 31 mars 2015

[v] Cette information a, par ailleurs, été récemment rapportée par des médecins et des infirmiers le 7 octobre 2015 dans une tribune du Monde : Dans la « jungle » de Calais : « Médicalement, ce que nous avons vu est inacceptable ». »

Défenseur des droits : la non-réponse de Cazeneuve

18 dimanche Oct 2015

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 11 Commentaires

Étiquettes

bidonvilles, Calais, discriminations, Droits de l'homme, Exilés, mineurs, santé, violences policières

Le Défenseur des droits avait déjà rendu une décision en 2012 concernant le harcèlement policier à Calais, sur la base d’une saisine de 2011. C’était l’époque Cahuzac, et comme son collègue, le ministre de l’intérieur Manuel Valls nie « en bloc et en détail », droit dans les yeux. Sa réponse est en trois points : 1. les faits ne sont pas avérés 2. les faits sont anciens 3. un CRS a été sanctionné en 2010, donc on fait le nécessaire.

Le Défenseur des droits est à nouveau saisi par de multiples sources début 2015 (voir ici, ici, ici et là), s’autosaisit également sur certains aspects, et rend un nouveau rapport le 6 octobre.

La réponse du ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, est rapide (8 jours), longue, touffue, mal écrite et mal étayée. Le but n’est pas qu’on croie ce qu’écrit le ministre, le but est de brouiller les pistes, et de rendre inaudible ce que dit le Défenseur des droits.

Un exemple révélateur, il y a dans le bidonville 3 points points d’eau, qui sont des tuyaux sur lesquels il y a plusieurs robinets. Et bien en bas de page 7 de sa réponse, le ministre joue sur le nombre de points d’eau et le nombre total de robinets pour dire que le Défenseur des droits ne sait pas ce dont il parle. Ça dit le niveau.

Et on pourrait prendre paragraphe par paragraphe la réponse de Cazeneuve, faite d’informations décontextualisées, de chiffres non explicités, de contre-arguments qui en fait ne répondent pas aux éléments soulevés par le Défenseur des droits, de propos méprisants, d’arguties qui déplacent le problème. Brouiller les pistes et décrédibiliser, par des propos qui relèvent d’une polémique de comptoir. Mais une réponse faite d’éléments simples, face à un rapport de 85 pages s’appuyant sur des éléments juridiques, étayé par des témoignages et une enquête de terrain.

Le souci de Cazeneuve est de refermer au plus vite tout débat que pourrait susciter le rapport du Défenseur des droits, et de pouvoir continuer à faire la même chose que jusqu’à présent, sans trop faire de vagues si possible, jusqu’à ce qu’une élection entraîne la nomination d’un autre ministre de l’intérieur.

En attendant, la réalité est là, intolérable.

 

Le Défenseur des Droits rappelle l’État de droit

08 jeudi Oct 2015

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 29 Commentaires

Étiquettes

bidonvilles, Calais, discriminations, Droits de l'homme, Exilés, mineurs, santé, violences policières

Le Défenseur des Droits avait été saisi une première fois  en 2011 d’un volumineux rapport documentant les violences et le harcèlement policiers à l’encontre des exilé-e-s à Calais. Après enquête, il avait rendu une décision particulièrement ferme par rapport aux faits constatés, et surtout par rapport à leur quotidienneté. Le ministre de l’intérieur d’alors, Manuel Valls, lui avait opposé une fin de non-recevoir.

Saisi au début de cette année de témoignages recueilli par Human Rights Watch à Calais (voir ici et là), d’un nouveau rapport concernant la période 2012 – 2014 (voir ici et là) et d’éléments plus récents communiqués par différents associations, le Défenseur des Droits a décidé cette fois d’une approche globale de la situation et des droits des exilé-e-s, abordant aussi bien les questions d’hébergement, d’expulsions de campements, d’accès à la santé, de droits des mineurs, de situation particulière des femmes, de droits des demandeurs d’asile, et encore de violences policières.

Résultat de son travail ont été publiés le 6 octobre un rapport de 85 pages accompagné de 9 pages de recommandations, qu’il nous faudra un peu de temps pour étudier.

Ci-dessous le communiqué du Défenseur des Droits :

 

http://www.defenseurdesdroits.fr/fr/presse/communiques-de-presse/calais-le-defenseur-des-droits-emet-des-recommandations-sur-les

« Calais : le Défenseur des droits émet des recommandations sur les difficultés d’accès aux droits fondamentaux des exilés

06 Octobre 2015
Communiqués de presse
Mots clés : Migrants
Domaine de compétence de l’institution : Lutte contre les discriminations

Les atteintes préoccupantes aux droits fondamentaux des exilés à la frontière franco-britannique ne sont pas nouvelles. Elles émaillent la chronique de l’actualité depuis une vingtaine d’années.

La première saisine dont a fait l’objet le Défenseur des droits, lors de son installation en juin 2011 concernait déjà la situation de Calais. Après plusieurs mois d’enquête et s’être rendu sur place à deux reprises, il a publié en fin 2012 une recommandation générale relative à la situation des migrants dans le Calaisis. Fin 2014, il a également émis des observations sur la mise en place, au cours de l’été 2013 d’un dispositif de filtrage de l’accès au site de distribution des repas aux migrants, à Calais. Il a été de nouveau saisi en début de l’année 2015 de plusieurs réclamations relatives à des sujets aussi divers que les difficultés d’accès aux soins ou le comportement des forces de l’ordre.

A l’occasion de deux missions menées les 16 et 17 juin, puis le 20 juillet 2015, les services du Défenseur ont rencontré les acteurs locaux, visité les principaux lieux de vie des exilés de la ville de Calais, notamment le bidonville jouxtant le centre d’accueil Jules Ferry, centre d’hébergement réservé aux femmes et aux enfants, la permanence d’accès aux soins de santé.

De cette enquête approfondie, le Défenseur des droits tire différents constats et formule plusieurs recommandations dans un rapport rendu public ce jour sur les difficultés que les exilés, maintenus à Calais contre leur gré, rencontrent dans l’accès à leurs droits fondamentaux.

Le Défenseur des droits :

  • rappelle le caractère inconditionnel du droit à l’hébergement d’urgence consacré par la loi et souligne que les autorités publiques sont tenues de proposer sans délai des solutions d’hébergement à tous les migrants contraints de vivre dans des bidonvilles. Il demande notamment qu’un inventaire des ressources foncières soit effectué ;
  • rappelle l’invitation faite aux préfets, aux termes de la circulaire du 26 aout 2012 d’assurer un accompagnement aux personnes expulsées en soulignant l’obligation de garantir la continuité de la scolarisation pour les mineurs et l’accès aux soins ;
  • préconise que des moyens financiers et matériels supplémentaires soient alloués à la gestion du centre d’accueil Jules Ferry, qu’au moins dix points d’eaux supplémentaires soient installés sur la zone concernée, et qu’un dispositif régulier de ramassage des ordures soient mis en place ;
  • demande, s’agissant de l’accès aux soins que les moyens alloués à la Permanence d’accueil
    sanitaire et sociale (PASS) soient augmentés et qu’une « PASS mobile » soit créée pour pouvoir intervenir directement dans le bidonville ;
  • demande que soient mis en place des mesures particulières et des moyens financiers, matériels et humains pour les mineurs, isolés ou non, qui se trouvent dans le Calaisis ;
  • attire l’attention des pouvoirs publics sur l’extrême vulnérabilité des femmes présentes dans le Calaisis et recommande que soit organisée une mise à l’abri immédiate de toutes les femmes isolées présentes sur le campement. Il préconise que le nombre de places d’hébergement allouées aux femmes et à leurs enfants soient triplées.
  • déplore que les violences décrites dans son rapport de 2012 n’aient pas disparu, l’usage du gaz lacrymogène étant même devenu « fréquent » et poursuit l’instruction des réclamations qui lui ont été adressées depuis le début de l’année.

Toutefois, des réponses exclusivement humanitaires, aussi urgentes soient elles, ne sauraient suffire : Calais reste le symptôme, certes spectaculaire, des écueils de la politique migratoire de l’Union européenne tendant à la réduction des voies légales d’émigration. A cet égard, le Défenseur des droits rappelle que le droit de quitter un pays, y compris le sien, notamment pour demander l’asile, est un droit internationalement et constitutionnellement consacré.

Dans ce sens, s’il se félicite de l’ouverture depuis le début 2015 de nombreuses procédures de demande d’asile, le Défenseur des droits recommande la suspension au moins temporaire du règlement Dublin III.

Les événements de ces derniers mois, dont Calais n’est qu’une illustration, traduisent l’ardente nécessité de trouver de nouvelles réponses qui, sans renoncer aux exigences de sécurité et de lutte contre la traite des êtres humains, permettent d’accueillir ces hommes, ces femmes et ces enfants dans le respect effectif des droits fondamentaux que la France s’honore de leur reconnaître. »

Vous pouvez télécharger le rapport ici.

Vous pouvez télécharger les recommandations ici.

 

 

VOUS VOUS APPELEZ ARROSOIR ZZFICTIF

26 dimanche Juil 2015

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 5 Commentaires

Étiquettes

Calais, Exilés, santé, solidarité, violence

Hôpital de Calais. Les exilé-e-s qui s’y présentent ne peuvent souvent pas justifier de leur identité. Il serait possibilité de fonctionner sur du déclaratif, les personnes donnent un nom, réel et fictif, et le personnel leur explique que les fichiers de l’hôpital ne sont pas connectés aux services de police, que la confidentialité est assurée, et qu’elles ont intérêt à donner le même nom aux différents services auxquels elles peuvent avoir affaire, pour permettre un suivi médical.

Au lieu de ça, c’est l’ordinateur qui donne une « identité » à la personne, en lui attribuant un « prénom » tiré d’une liste de noms communs, et comme nom de famille Zzfictif. On devient ainsi Arrosoir X. Monsieur ou Mme Arrosoir Zzfictif. Comme une nouvelle « identité » est générée à chaque visite, aucun suivi de la personne n’est possible. Ainsi, un exilé a été hospitalisé pour des problèmes cardiaques, puis s’est rendu plusieurs fois aux urgences pour la même maladie. Il est mort le 9 décembre 2013, faute d’avoir reçu le traitement approprié. Le système n’a pas été remis en cause pour autant.

Cette dépersonnalisation laisse d’autres traces.

Tout récemment, un femme chute d’un camion. Suite au choc, elle accouche à l’hôpital d’un petit Samir. Le bébé, très prématuré (22 semaines), meurt. La maman de vient « Introuvable ». C’est-à-dire qu’elle est sortie de l’hôpital, puisqu’elle n’avait plus rien à y faire. Elle n’avait pas besoin d’aide, de soutien, après la mort de son enfant ?

Plus classique, un-e exilé-e arrive aux urgences en soirée, ressort au milieu de la nuit. Se retrouve devant l’hôpital, une jambe plâtrée, et à la main un bon pour retirer le lendemain des béquilles aux heures ouvrables. Pour rentrer au bidonville, une personne valide met une heure et demie à pied, le long de l’autoroute. Alors bien sûr, quelqu’un d’ici, une personne de la famille viendra le prendre en voiture, il pourra faire appel à une ambulance privée, ou prendre un taxi, pour rentrer dans sa maison. Mais quelqu’un d’ailleurs…

Le 7 mai 2014, un exilé meurt sur l’autoroute, percuté par un véhicule. Selon la presse : « Les deux passagers de la voiture qui a heurté la victime étaient en  état de choc au moment du drame. Ils ont été pris en charge par une  cellule psychologique du centre hospitalier de Boulogne. Les deux clandestins qui accompagnaient la jeune victime ont été  auditionnés par les enquêteurs afin d’obtenir plus d’éléments. » Le chauffeur et son passager sont pris en charge psychologiquement, ce qui est normal. Les deux exilés qui viennent de voir leur camarade mourir sont interrogés par la police. Même scénario avec l’étrange accident du 22 juillet 2015 : le chauffeur du véhicule est pris en charge psychologiquement, les trois victimes ne sont soignées que physiquement. Ça semble une évidence, il y a des gens qui ont un psychisme, et d’autres pas.

Cette dépersonnalisation gagne parfois les pratiques associatives, lorsqu’on n’y prend pas garde.

Juillet 2015. Une ONG humanitaire distribue de l’aide alimentaire. Pour cela, elle distribue des tickets, avec lesquelles les bénéficiaires viennent retirer leur colis. Pour éviter la fraude au ticket, les personnes qui viennent retirer leur colis reçoivent une marque rouge sur le bras. Les bénéficiaires sont des fraudeurs potentiels, pour éviter la fraude on les marque, pour manger il faut accepter d’être marqué. Ceux et celles qui refusent d’être marqué-e-s ne reçoivent pas l’aide.

Juillet 2014. Une ONG humanitaire aménage des « douches » dans la grande cour du squat Galou. Ce ne sont pas de vraies douches, avec des tuyaux et un jet d’eau qui vient par le haut, ce sont des cabines dans lesquelles il y a un grand récipient d’eau pour se laver. Grands récipients pratiques et pas chers, des poubelles en plastique. En Grèce, on apprend que l’Europe c’est manger dans les poubelles. En France, c’est se laver dans des poubelles. Les premiers utilisateurs ne s’y sont pas trompé, ils chiaient dedans – usage bien adapté au signifiant « poubelle ».

Les dispositifs mis en place doivent-ils être indifférents à ce qu’ils disent aux gens ? Ces gens-là n’ont-ils pas le droit non plus à l’estime de soi ?

 

Pentax Digital CameraUne « douche » à l’occupation Galou.

PRISE DE RISQUE

15 mercredi Juil 2015

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ 2 Commentaires

Étiquettes

Calais, Exilés, Frontière, mort, santé

La nuit dernière, quatre exilés ont été brûlés par un arc électrique au niveau des caténaires en se hissant sur une des navettes qui empruntent le Tunnel sous la Manche. Ils ont été hospitalisés, deux d’entre eux dans un état grave.

Ce nouvel accident illustre l’aggravation des risques que prennent les exilés lors des tentatives de passages, qui s’est aussi traduite par quatre décès en un peu plus d’un mois.

Malgré les aménagements tardifs réalisés par les autorités, les conditions de vie empirent dans le bidonville d’État, où le nombre d’abris est insuffisant pour les nouveaux arrivants. Deux des campements subsistant en centre-ville sont sous la menace d’une expulsion, tandis que les expulsions du 2 juin ont elles-mêmes laissé des traces dans le sentiment de précarité de leurs anciens habitants. Il y a une pression à partir, à quitter ces conditions à tout prix.

Les nouvelles grilles à l’est du port et le long de l’autoroute d’accès rendent le passage plus difficile de ce côté, de nouvelles mesures pour résorber les embouteillages du côté du Tunnel sous la Manche réduisent les possibilités de monter dans les camions et de s’y cacher à ces occasions. Les exilé-e-s entrent donc de plus en plus souvent dans le périmètre du Tunnel pour essayer de monter directement dans les navettes. Monter dessus, monter en marche, s’accrocher à l’extérieur alors les trains vont aller à 140 km/h dans le Tunnel, les risques sont importants, et l’appréciation des risques différente de ce qu’est se glisser dans ou sous un camion.

La réponse d’Eurotunnel est de dresser de nouvelles grilles autour des quais d’embarquement sur les navettes. Cela entraînera une évolution des méthodes de passage, avec probablement plus de prise de risque.

Et les affichettes qui sont distribuées ne figurent pas les facteurs de risque suffisamment précisément pour apprendre à les éviter. Dire que c’est dangereux, les gens le savent. Mais ces risques sont faibles par rapport à ce qu’ils ont connu dans leur pays et sur la route pour arriver jusqu’ici. Et c’est peut-être difficile à comprendre pour nous qu’une voix avertit qu’il faut faire attention à l’écart entre le marche-pied et le quai à chaque fois que nous descendons d’un train, dans un pays où on ferme les parcs publics au moindre vent de peur que nous ne recevions une branche sur la tête, à la moindre neige de peur que nous tombions. Ces hommes, ces femmes et parfois ces enfants sont prêt-e-s à risquer leur vie pour accéder à une vie digne, et l’ont déjà risquée pour arriver jusqu’à Calais.

Et les conditions qu’ils rencontrent à Calais sont faites pour les convaincre que ce n’est pas ici qu’ils et elles pourront construire leur vie et être reconnu-e-s dans leur dignité. Alors ils et elles continuent leur chemin, en prenant les risquent que ça suppose.

 

LE CENTRE PRIMO LEVI

04 mercredi Mar 2015

Posted by passeursdhospitalites in Non classé

≈ Poster un commentaire

Étiquettes

Asile, Calais, Exilés, santé, solidarité

Le Centre Primo Levi publie sur son site un bref bilan de son activité en 2014 en soutien à des personnes victimes de la torture, demandeur-se-s d’asile et réfugié-e-s pour la plupart.

Quelques chiffres, quelques phrases à propos des personnes accueillies et soignées :

« Ils ont été victimes d’emprisonnement arbitraire, de menaces de mort… Ils ont subi des pressions psychologiques, des violences physiques graves… Ils ont été témoins du viol ou du massacre de leurs proches…

Ils ont dû fuir leur pays, laissant derrière eux leur vie, leur travail, leur communauté, leurs proches, parfois même un enfant laissé à la hâte à quelqu’un… Ils ont parcouru des dizaines de milliers de kilomètres à la merci impitoyable des passeurs, jusqu’à arriver en France où, quelques mois ou quelques années plus tard, on leur a indiqué l’adresse du Centre Primo Levi… »

http://www.primolevi.org/2014-en-bref

Le Centre Primo Levi est à Paris, il existe quatre ou cinq autres centres spécialisés ailleurs en France. Et sinon rien, à Calais comme presque partout ailleurs.

On pense à cet homme arrivé il y a quatre ans, qui marchait toute la journée d’un pas rapide, mangeait et dormait à l’écart des autres, ne parlait pas, n’a pas changé de vêtement pendant un an. Quatre ans plus tard, il se change et se lave, répond au bonjour, mais sans s’arrêter, et marche toujours à longueur de temps.

On pense à tous ceux et toutes celles qui donnent l’impression d’une brisure qu’ils ou elles cachent plus ou moins. Qui explosent parfois de violence. Qui décompensent à un moment et semblent se retirer du monde.

On pense à ceux qui noient leur problème dans l’alcool.

À Calais avec la rue pour tout accueil, et quelques bénévoles qui font ce qu’ils ou elles peuvent.

 

 

← Articles Précédents

Passeurs d’hospitalités

Passeurs : font circuler la parole, et relient les êtres et les rives.

Hospitalités : les mille formes de l'accueil et de la rencontre entre les êtres.

Le bloguistan des Passeurs d’hospitalités

  • Passeurs d’hospitalités – English
  • Exilés dans les Balkans (fr)
  • Exiles in the Balkans (en)
  • Lampedusa – une île

Contact :

passeurs.dhospitalites (at) laposte.net

Entrez votre adresse mail pour suivre ce blog et être notifié par email des nouvelles publications.

Abonnement flux RSS

  • RSS - Articles

Articles récents

  • Énième expulsion à Calais : un harcèlement étatique à défaut d’une politique humanitaire
  • Mouvement de contestation réprimé au CRA de Coquelles !
  • Le Tribunal Administratif rejette la requête de la Commune de Calais concernant l’expulsion du site dit de ‘BMX’ à Calais
  • Racisme ordinaire et refus d’accès aux soins au CRA de Coquelles: « Pour la première fois, j’avais l’impression que je ne valais rien »
  • Eloignement forcé aux gaz lacrymogènes et plaquage ventral au sein du CRA de Coquelles
  • Au CRA de Plaisir, on n’est pas malade à cause du Covid mais à cause de l’enfermement !
  • À Calais, au beau milieu de l’hiver, deux initiatives mettent les plus vulnérables à l’abri
  • À Calais, une justice complice du harcèlement étatique des exilé.e.s
  • Coquelles : Justice des libertés et de la détention, justice fantôme ?
  • Expulsion vs mise à l’abri : jeu de maux à Calais

Archives

  • avril 2021
  • mars 2021
  • février 2021
  • janvier 2021
  • décembre 2020
  • novembre 2020
  • octobre 2020
  • septembre 2020
  • août 2020
  • juillet 2020
  • mars 2020
  • mai 2018
  • mars 2018
  • février 2018
  • janvier 2018
  • septembre 2017
  • août 2017
  • juillet 2017
  • juin 2017
  • mai 2017
  • avril 2017
  • mars 2017
  • février 2017
  • janvier 2017
  • décembre 2016
  • novembre 2016
  • octobre 2016
  • septembre 2016
  • août 2016
  • juillet 2016
  • juin 2016
  • mai 2016
  • avril 2016
  • mars 2016
  • février 2016
  • janvier 2016
  • décembre 2015
  • novembre 2015
  • octobre 2015
  • septembre 2015
  • août 2015
  • juillet 2015
  • juin 2015
  • mai 2015
  • avril 2015
  • mars 2015
  • février 2015
  • janvier 2015
  • décembre 2014
  • novembre 2014
  • octobre 2014
  • septembre 2014
  • août 2014
  • juillet 2014
  • juin 2014
  • mai 2014
  • avril 2014
  • mars 2014
  • février 2014

Articles récents

  • Énième expulsion à Calais : un harcèlement étatique à défaut d’une politique humanitaire
  • Mouvement de contestation réprimé au CRA de Coquelles !
  • Le Tribunal Administratif rejette la requête de la Commune de Calais concernant l’expulsion du site dit de ‘BMX’ à Calais
  • Racisme ordinaire et refus d’accès aux soins au CRA de Coquelles: « Pour la première fois, j’avais l’impression que je ne valais rien »
  • Eloignement forcé aux gaz lacrymogènes et plaquage ventral au sein du CRA de Coquelles
  • Au CRA de Plaisir, on n’est pas malade à cause du Covid mais à cause de l’enfermement !
  • À Calais, au beau milieu de l’hiver, deux initiatives mettent les plus vulnérables à l’abri
  • À Calais, une justice complice du harcèlement étatique des exilé.e.s
  • Coquelles : Justice des libertés et de la détention, justice fantôme ?
  • Expulsion vs mise à l’abri : jeu de maux à Calais

Archives

  • avril 2021
  • mars 2021
  • février 2021
  • janvier 2021
  • décembre 2020
  • novembre 2020
  • octobre 2020
  • septembre 2020
  • août 2020
  • juillet 2020
  • mars 2020
  • mai 2018
  • mars 2018
  • février 2018
  • janvier 2018
  • septembre 2017
  • août 2017
  • juillet 2017
  • juin 2017
  • mai 2017
  • avril 2017
  • mars 2017
  • février 2017
  • janvier 2017
  • décembre 2016
  • novembre 2016
  • octobre 2016
  • septembre 2016
  • août 2016
  • juillet 2016
  • juin 2016
  • mai 2016
  • avril 2016
  • mars 2016
  • février 2016
  • janvier 2016
  • décembre 2015
  • novembre 2015
  • octobre 2015
  • septembre 2015
  • août 2015
  • juillet 2015
  • juin 2015
  • mai 2015
  • avril 2015
  • mars 2015
  • février 2015
  • janvier 2015
  • décembre 2014
  • novembre 2014
  • octobre 2014
  • septembre 2014
  • août 2014
  • juillet 2014
  • juin 2014
  • mai 2014
  • avril 2014
  • mars 2014
  • février 2014

Méta

  • Inscription
  • Connexion
  • Flux des publications
  • Flux des commentaires
  • WordPress.com

Propulsé par WordPress.com.

Annuler

 
Chargement des commentaires…
Commentaire
    ×
    Confidentialité & Cookies : Ce site utilise des cookies. En continuant à utiliser ce site, vous acceptez leur utilisation.
    Pour en savoir davantage, y compris comment contrôler les cookies, voir : Politique relative aux cookies