11 requérants exilés, soutenues par 8 associations[1] et leur avocate Maitre Thieffry, font appel de la décision du juge de Boulogne-sur-Mer du 6 janvier dernier, par laquelle le juge judiciaire s’est déclaré incompétent pour trancher de la légalité de l’expulsion de la jungle dite d’Hôpital réalisée par les forces de l’ordre le 29 septembre 2020.

Dans sa décision, le juge, reprenant l’argumentaire du préfet, ne retient pas la qualification d’expulsion. Cette opération, sous la responsabilité du procureur, serait intervenue pour mettre fin au délit « d’installation sur le terrain d’autrui », dans le cadre de la flagrance. Or ce délit seul ne permet pas légalement d’expulser les personnes visées, ni la destruction des biens.

La présence du préfet se justifierait uniquement par une opération de mise à l’abri sans contrainte, non coordonnée avec l’opération d’expulsion, alors même que nombre de preuves contraires ont été apportées. Ainsi, « les forces de l’ordre accompagnant des migrants jusqu’aux bus, les fouillant à l’entrée des bus, se trouvant à l’intérieur des bus ou escortant les bus dans la ville » ne sont pas reconnus comme une contrainte !

Cette interprétation est éloignée de la réalité : expulsion et éloignement ont été pensés comme une seule opération contrainte faisant de cette « mise à l’abri », une véritable entreprise de transfert forcé des personnes exilées hors de Calais; entreprise réalisée en dehors de tout cadre légal.

Ces dérives s’inscrivent dans une politique généralisée d’expulsions. Il en découle  des pratiques et  des décisions qui s’apparentent à du harcèlement, en violant les droits fondamentaux des personnes et les engagements nationaux et internationaux de la France.

Expulsions quasi quotidiennes sur plusieurs lieux, multiplication des arrêtés anti-distribution alimentaire dans le centre-ville, installation de pierres pour les entraver, multiplication des violences et des discriminations, entrave à la liberté d’informer des journalistes lors des expulsions, les exemples d’hostilité ne manquent pas à Calais, rendant chaque jour plus difficile la survie des personnes en exil.

La seule politique acceptable est de proposer des solutions de logement dignes à ces enfants, ces femmes, ces hommes dont aucun n’a choisi de vivre dans ces conditions. Les associations signataires, qui sont intervenues aux côtés des habitants,   continueront de veiller avec vigilance au respect de leurs droits. C’est la précarité qu’il faut combattre, et non les personnes qui en sont les victimes.

Associations signataires : L’Auberge des migrants, la Cabane Juridique, Calais Food Collective, Choose Love, Collective Aid, Fondation Abbé Pierre, Human Rights Observers, Project Play, Refugee Youth Service, Salam Nord-Pas-de-Calais, Secours Catholique – Caritas France, Utopia 56.


[1] L’Auberge des migrants, la Cabane Juridique, Fondation Abbé Pierre, Choose Love, Project Play, Salam Nord-Pas-de-Calais, Secours Catholique – Caritas France, Utopia 56.