Devant la médiatisation de l’arrivée d’exilés d’Afrique de l’est en Europe et en France, et en particulier de la situation à Calais, le ministre de l’intérieur se doit de donner l’impression qu’il fait quelque chose alors qu’il ne fait rien.
La crise, si crise il y a, ne vient pas de l’arrivée de quelques cent mille personnes dans une Union européenne qui compte cinq cent millions d’habitants. Qui plus est, la plupart de ces personnes, de par leur âge ou les raisons de leur exil, devraient avoir accès à une protection en Europe, comme mineurs ou comme réfugiés, et donc accéder à un statut légal.
Si crise il y a, elle est due au non-accueil, et notamment à la politique des autorités françaises visant à dissuader les personnes en droit d’accéder à une protection en France, en vertu du droit international, européen et français, d’y rester et de demander cette protection. Délais d’accès aux guichets des préfectures, carences de l’hébergement, désorganisation de l’accompagnement, pour les demandeurs d’asiles, obstacles multiples et mise en doute de l’âge pour les mineurs. La réforme de la législation sur l’asile prévue pour cet automne aggravera cette situation.
Bien sûr, des personnes qui pourraient demander et obtenir la protection de la France continuent leur route vers d’autres pays qu’elles souhaitent mieux accueillants, entre autres le Royaume-uni. Et on les retrouve à Calais risquer leur pour grimper dans des camions qui leur permettront peut-être de franchir la Manche. Calais où le harcèlement policier achève de les dissuader de rester en France.
Pour donner l’impression qu’il fait quelque chose, le ministre de l’intérieur court les capitales européennes, pour aggraver de concert les politiques de non-accueil. Or c’est bien le gouvernement français qui est responsable de sa politique d’accueil ou de non-accueil. Il est responsable du mal qu’il cause, et il ne le fera pas disparaitre en l’aggravant.
Pris à contre-pied par la demande de la maire de Calais d’ouvrir un centre d’accueil pour les exilés, le ministre botte en touche invoquant « l’appel d’air » (une sorte de bouée de sauvetage permettant de ne pas répondre à la question posée) et en promettant une « mission » confiée à deux hauts fonctionnaires.
Pendant deux ans, des réunions de « concertation » se sont tenues, un diagnostic a été promis, des crédits auraient dus être demandés à la DIHAL (Direction Interministérielle pour l’Habitat et l’Accès au Logement). On a déjà beaucoup parlé. De quelle « mission » a-t-on besoin ?
Aujourd’hui, l’urgence est de savoir comment on va passer l’hiver.
L’urgence est d’arrêter le harcèlement policier, aggravé par les renforts de CRS affectés à Calais.
L’urgence est une réunion rapide des acteurs concernés, non pour étudier mais pour décider : des lieux, des aménagements, un accompagnement des personnes, un budget.
Tout le reste n’est que posture politicienne.