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C’est une maison de l’avenue Blériot à Calais, habitée de manière continue depuis à-peu près un an par des exilés de différents pays arabes, principalement d’Égypte. Les relations avec le voisinage sont paisibles, voir chaleureuses avec quelques voisins sympathiques et attentionnés. Aujourd’hui la maison est habitée par une quarantaine de personnes, dont une quinzaine de mineurs, certains ayant à peine passé dix ans.

Un jugement d’expulsion a été rendu le 2 septembre et signifié hier par voie d’huissier. La suppression du délais légal de deux mois pour quitter les lieux n’ayant pas été demandée, celui-ci s’applique (article L 412-1 du Code des procédures civiles d’exécution). Théoriquement, celui-ci devrait servir aux pouvoirs publics pour proposer des solutions de relogement.

Article L412-1

Si l’expulsion porte sur un local affecté à l’habitation principale de
la personne expulsée ou de tout occupant de son chef, elle ne peut avoir
lieu qu’à l’expiration d’un délai de deux mois qui suit le commandement,
sans préjudice des dispositions des articles L. 412-3 à L. 412-7.
Toutefois, le juge peut, notamment lorsque les personnes dont
l’expulsion a été ordonnée sont entrées dans les locaux par voie de fait
ou lorsque la procédure de relogement effectuée en application de
l’article L. 442-4-1 du code de la construction et de l’habitation n’a
pas été suivie d’effet du fait du locataire, réduire ou supprimer ce
délai.

La lecture de la requête et du jugement nous apprend des choses intéressantes quand à la manière dont les choses se passent à Calais :

– c’est suite à une mise en demeure de la mairie de Calais que le propriétaire porte plainte et entame une procédure d’expulsion;

– il porte plainte auprès de la police aux frontières (sur recommandation de la mairie ?), qui comme son nom l’indique n’est pas la police des contentieux entre propriétaires d’un bien immobilier et occupant de ce bien; mais à Calais cette police est détournée de son objet pour devenir la police couvrant les différents aspects de la vie d’une population, les « migrants », mais aussi de leurs soutiens;

– il donne à la police une autorisation permanente de pénétrer dans les lieux, alors qu’il s’agit du domicile des personnes qui y habitent (on pourrait ajouter qu’aucun jugement n’établit alors qu’il s’agit d’occupants sans titre);

– le jugement identifie les habitants comme des « migrants » (la requête parlait de « clandestins »), cite leur nationalité, mais entérine une procédure non-contradictoire au prétexte qu’aucun d’entre eux n’aurait donné son identité à l’huissier, sans se soucier de la compréhension de leurs droits et de la procédure qu’ils peuvent avoir;

– le jugement se fait en tenant compte de manière exclusive des droits du propriétaire, ignorant les pans de la législation française concernant le droit au logement, le droit inconditionnel à l’hébergement d’urgence, tout comme ce qui découle de la situation de dénouement des personnes concernées ou la vulnérabilité de certaines d’entre elles – comme les enfants.

Une illustration parmi d’autres des distorsion des institutions sous l’effet de l’impératif de la chasse aux exilés.

 

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