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Cent quatre-vingt-quinze témoignages écrits ont été rédigés, par des habitant-e-s, des bénévoles, des personnes de passage, à propos des magasins et des restaurants du bidonville à l’occasion du procès devant le tribunal administratif de Lille suite à la demande de la préfecture de pouvoir les détruire (voir ici, ici et ). Des textes souvent courts, images du quotidien du bidonville. Un nombre qui montre leur importance dans la vie de celui-ci.

Un témoignage parmi d’autres, de bénévole :

« J’ai pu constater que des magasins se sont déjà créés dans le passé dans des campements éloignés du centre-ville et qui ont duré suffisamment longtemps pour s’organiser, parfois aussi des salons de thé ou des restaurants. C’était le cas du campement des Afghans en 2009, ou de ceux de Tioxide et du Bois Dubrûles en 2015, avant qu’ils soient évacués et leurs habitants regroupés sur le site actuel.

Là, des échoppes et des restaurants se sont créés pratiquement dès le début, en avril 2015. Leur nombre a augmenté avec l’augmentation de la population.

Je suis allé à différentes reprises dans des restaurants de la partie sud du bidonville aujourd’hui disparue ou de la partie nord, avec des Européens, bénévoles, journalistes, chercheurs, artistes. Nous pouvions y discuter en buvant un thé ou un café, ou y manger à l’heure du repas.

J’ai pu constater que chaque restaurant était aménagé avec autant de soin qu’il est possible dans ces conditions précaires, et avait sa personnalité. Ils se rapprochaient autant que je puisse en juger de ceux existant dans le pays d’origine des personnes y travaillant, apportant aux personnes qui les fréquentaient une certaine normalité dans des conditions de vie destructurantes. Ils étaient fréquentés par des habitants du bidonville de toutes origines et par des Européens, qui s’y retrouvaient pour discuter, passer un moment, prendre une boisson chaude, recharger leur téléphone. La quasi totalité ne servaient pas de boissons alcoolisées. J’ai trouvé la nourriture généralement excellente.

J’ai passé une partie du Réveillon 2015-2016 dans un bar de la partie sud avec des amis européens et syriens, avant que nous allions rendre visite à des amis soudanais.

Les personnes que j’ai connues qui travaillaient dans des magasins ou des restaurants étaient à Calais depuis longtemps. C’était pour elles un moyen d’avoir une activité et un petit revenu sans travailler pour des passeurs.

J’ai plus particulièrement fréquenté le restaurant où travaillait un ami qui n’est plus à Calais maintenant. J’y ai mangé plusieurs fois avec des amis européens. La nourriture était très bonne et l’accueil chaleureux. Des gens venaient aussi là simplement pour passer un moment, recharger leur portable sans consommer, écouter de la musique ou regarder un match de foot ou de cricket.

La disparition de ces lieux affecterait profondément et précariserait la vie sociale dans le bidonville. »