Étiquettes

, , , ,

On l’oublie parfois, mais les exilé-e-s de Calais ne sont pas tous et toutes dépourvu-e-s de droit au séjour. En clair, une partie d’entre elles et eux sont en situation régulière sur le territoire français.

Certain-e-s ont un titre de séjour délivré par un autre État de l’espace Schengen, souvent l’Italie, comme réfugié-e ou un permis de travail. Ils et elles peuvent donc effectuer un court séjour – jusqu’à trois mois – en France.

A priori les autorités ne peuvent pas expulser ces personnes pendant ce délais de trois mois, puisqu’elles sont régulièrement en France, et la date d’entrée en France est difficile à prouver à défaut de contrôles à la frontière.

Pourtant, selon le rapport 2014 sur la rétention (à partir de la page 31 pour le centre de rétention de Coquelles), 29% des placements en rétention correspondent à des réadmissions Schengen, et plus de la moitié des expulsions effectivement réalisées sont vers un autre pays de l’Union européenne.

De même, les citoyens albanais n’ont plus de besoin de visa pour un court séjour (jusqu’à trois mois) dans l’espace Schengen. Ils représentent pourtant plus de la moitié des personnes placées en rétention à Coquelles (53,5%).

Pays où il est facile d’expulser, pays d’où il est facile de revenir, parfois dans la semaine.

À noter au passage que si le Royaume-uni faisait partie de l’espace Schengen, ces personnes ne seraient pas bloquées à sa frontière.

En situation régulière les mineur-e-s, qui n’ont pas à justifier de la régularité de leur séjour selon la loi. Ils et elles sont quelques centaines dans le bidonville d’État et les autres lieux du Calaisis. L’Aide sociale à l’enfance devrait prendre des mesures, mais laisser les mineurs à la rue fait partie des politiques de dissuasion pour les inciter à aller voir plus loin. C’est rare, mais des mineurs isolés sont parfois placés en rétention, parce que les policiers n’ont pas considéré qu’ils étaient mineurs, et la préfecture a suivi. Plus souvent, on a un tri au faciès des personnes arrêtées, les mineurs sont relâchés, mais l’adulte, père ou grand frère, est placé en rétention, parfois envoyé dans un centre ailleurs en France. Quand au mineur, il devient ce qu’il peut. On reçoit régulièrement des appels de centres de rétention pour retrouver un jeune, parfois arrivé depuis quelques jours, dans le bidonville.

Celui-ci sert aussi, à grande échelle, de lieu de stockage pour demandeur-se-s d’asile. Il faut tout d’abord aujourd’hui quatre mois pour obtenir le rendez-vous à la sous-préfecture qui permet d’être enregistré comme demandeur-se d’asile. Pendant ces quatre mois, juste un papier de rendez-vous qui prouve que la personne a entamé des démarches pour demander l’asile, et qui protège en principe de l’expulsion. Ensuite, une fois la demande enregistrée par la sous-préfecture, il faut encore de un à trois mois pour avoir une proposition d’hébergement.

Et puis il y a les demandeur-se-s d’asile en procédure Dublin. Ils et elles ont fait une demande d’asile en France, mais c’est un autre pays qui est responsable d’examiner la demande d’asile selon le règlement Dublin III, en général parce que les empreintes digitales ont été prises lors de l’entrée dans l’Union européenne. Il faut généralement deux à trois mois pour déterminer le pays responsable. Puis, à partir du moment où il est notifié à la personne qu’elle doit retourner dans le responsable, il y a un délais de six mois. Si la France ne reconduit pas la personne dans le pays responsable, c’est elle qui devient responsable du traitement de la demande d’asile. Concrètement, les personnes en procédure Dublin attendent six mois dans le bidonville que les autorités françaises deviennent responsables de leur demande d’asile.

En principe, tou-te-s ces demandeur-se-s d’asile devraient être hébergé-e-s et bénéficier des conditions d’accueil définies par la législation européenne.

 

Pentax Digital CameraLe bidonville du Fort Nieulay, détruit le 2 juin 2015 dans le cadre de la concentration des exilées dans le bidonville d’État.