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Lorsqu’ils sont venus rencontrer les exilés hier mercredi, le directeur départemental de la cohésion sociale, le sous-préfets, puis le directeur général de l’OFPRA étaient accompagnés d’une interprète, en langue arabe. L’arabe n’est la langue ni de l’Afghanistan, ni de l’Iran, ni du Pakistan, ni de l’Éthiopie, ni de l’Érythrée… La traductrice a improvisé en anglais. A compris qui pouvait.

Les représentants des autorités ont invité les exilés à aller à l’antenne de l’OFII à Calais pour avoir plus d’informations sur la procédure d’asile. Un jeune homme en revient dépité. Il n’y avait pas de traducteur en arabe, et il a été désorienté par la traduction par téléphone. Quatre cents personnes ont été invitées à venir se renseigner sur la procédure d’asile auprès d’un organisme qui ne dispose pas de traducteur. C’est « la main tendue » et « l’effort national » dont parlait le préfet en conférence de presse.

On avait déjà eu le cas lorsque les exilés syriens avaient occupé l’accès piéton du port de Calais en octobre 2013. Deux agents de l’OFII ont été présents plusieurs heures sans parler à personne. Et comme le préfet avait – déjà – dit aux exilés de s’adresser à eux pour avoir des information sur l’asile, des gens sont venus les voir. C’est le moment où on a vu que les agents de de l’OFII ânonnaient péniblement un peu d’anglais, et n’étaient accompagnés d’aucun traducteur. À compris leurs explications qui a pu.

Le même problème se posera aux exilés qui choisiront de demander l’asile dans le cadre du dispositif proposé par le préfet et le directeur général de l’OFPRA. Ils seront dispersés dans toute la France dans des foyers d’hébergement d’urgence. Hors, le pris de journée que reverse l’État aux foyers pour l’accueil des demandeurs d’asile ne comprend ni l’accompagnement administratif ni l’accompagnement à la demande d’asile. Ils devront donc se débrouiller seuls pour compléter obligatoirement en français leur dossier de demande d’asile sous trois semaines, y compris le récit de vie détaillant les persécutions et les craintes le ayant amenés à fuir leur pays. Ils devront également se débrouiller pour faire les démarches auprès de Pôle emploi pour ouvrir leurs droits à l’Allocation Temporaire d’Attente, pour ouvrir un compte en banque, pour ouvrir leurs droits à la CMU… Les plate-formes d’information et d’accompagnement des demandeurs d’asile non hébergés en CADA (Centres d’Accueil des Demandeurs d’Asile) ayant été régionalisée, ils ne pourront en espérer un soutien que s’ils habitent le chef-lieu de région, ou l’une des rares préfectures de département où elles ont des antennes.

Le directeur général de l’OFPRA a annoncé que leurs demandes seraient traitées en trois mois. Combien seront de retour à Calais dans quatre mois après avoir reçu une réponse négative, faute d’un accompagnement adéquat ? Ou plus rapidement, faute d’avoir déposé leur demande en français dans les délais ? Et auront perdus toute chance de déposer une demande d’asile dans un autre pays européen, en vertu du règlement Dublin III, qui prévoit qu’on ne peut demander l’asile que dans un seul pays.

Les mesures d’accompagnement des expulsions de campements du 28 mai relevaient du bricolage : traitement de la gale au milieu de la cour du lieu de distribution des repas, envoi des mineurs pour cinq jours dans la campagne béthunoise sans perspective au-delà.

C’est encore de bricolage qu’il s’agit avec ce prétendu dispositif exceptionnel de prise en charge des demandeurs d’asile. C’est une simple diversion, pour détourner l’attention de l’objectif de la préfecture : évacuer le lieu de distribution des repas, et mettre à la rue les quatre cents personnes qui l’occupent aujourd’hui.

 

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